Foe
6.5
Foe

livre de J. M. Coetzee ()

Chemins qui ne mènent nulle part

La lecture de ce roman m'a plutôt déconcerté.


Comme le Vendredi de Michel Tournier, il s'agit d'une variation sur le mythe de Robinson Crusoe, mais, contrairement au roman de Tournier, on ne comprend pas l'usage que Coetzee veut faire de ce mythe.


Créer des fictions parallèles, à partir de mondes ou de personnages solidement ancrés dans l'imaginaire des lecteurs me parait, sur le papier, une idée excitante. Cela donne une liberté inouie à l'auteur qui, n'ayant pas besoin de décrire certains détails de l'univers, par définition déjà connu, peut tourner autour, jouer sur ses contours et créer une incroyable matière implicite qui stimule l'imagination du lecteur.
Il peut aussi moderniser un personnage, lui apporter des problématiques complètement absentes de l'histoire originale et leur donner du volume grâce à l'univers préexistant.


Cela demande néanmoins du travail et une certaine ambition narrative que l'on a peine à trouver dans ce Foe, roman à la fois court et confus.


S'agit-il de développer l'aspect psychologique de la solitude, les dérives mentales qu'elle implique ? Ou l'introduction de la féminité dans un mythe originellement masculin ? Ou la parole de l'esclave noir ? Ou le sens de la fiction en géneral, le fait de raconter une histoire ?


Sur le papier, un peu tout ça à la fois, mais dans le roman, rien de tout ça. On passe à cent à l'heure sur toutes ces questions et rien de vraiment intéressant ne se dégage. C'est très brouillon. Chaque chapitre semble oublier le précédent et, ne seraient les artifices un peu lourds que Coetzee utilise pour masquer ce défaut, on pourrait presque croire lire un livre différent à chaque fois. Ou disons plutôt que ça ne ferait aucune différence si c'était un livre différent à chaque fois.


Une quantité de romans possibles sont esquissés sans qu'aucun ne commence vraiment. Il n'y a pas de construction solide et j'ai eu l'impression que Coetzee s'est lancé à l'aveugle dans cette fiction, se laissant emporter comme un misérable radeau sur la rivière de son esprit.


C'est un livre à la première personne, choix qui réduit a priori les possibilités d'interactions entre les personnages, la diversité des points de vue. Coetzee en fait un piètre usage. Il n'y a en vérité qu'un seul personnage qui soliloque sur des détails sans grande importance, avec des répétitions parfois pénibles.


Lu en Anglais (La faiblesse du livre n'est pas due à la traduction)

Feloussien
4
Écrit par

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le 21 nov. 2020

Critique lue 92 fois

Feloussien

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