Bon je ne vais pas mentir, je ne suis pas un fan inconditionnel de Cro-Mags même si je reconnais l’importance et la qualité d’un album comme The Age Of Quarrel. Mais quelle meilleure carte postale à ramener d’un voyage à Big Apple que l’autobio du mec le plus NY hardcore de la planète, Mr Harley Flanagan ?
De son enfance dans le ghetto Portoricain du Lower East Side, celui d’avant la gentrification, à la une des faits divers NYais avec la fameuse baston au couteau avec ses anciens collègues. De son enfance entourée de figures de la Beat Generation aux tournées avec Motörhead. Du trip skinhead aux temples Krishna. Des abus de tout ce qui est possible au végétarisme, la vie de Harley est celle de NY, celle de la pauvreté et de la violence, celle du NYHC.
En parlant de violence, celle-ci est omniprésente dans le bouquin, Harley semble à la fois la regretter (“I’m ashamed for having been that person, and for having known and been around people like that.”) et à la fois jubiler à l’évocation de bastons et autres rixes qui jalonnent sa vie, si bien que ça en devient vite relou et que le bouquin prend plus l’allure d’une discussion de comptoir avec ton pote skinhead bourré (le style d’écriture est super primaire, ce qui est pratique quand tu n’es pas parfaitement bilingue) que du document passionnant que promettaient les premiers chapitres. Tu rajoutes à ça les querelles et autres ragots avec son friend or foe John Joseph et ça devient tout de même assez pénible. Dommage car le NY dépeint au cours du livre, la vie absolument incroyable du personnage, et les anecdotes sur les débuts de la scène NYHC, auraient largement suffi et le livre passe du coup de claque documentaire crue, violente et réaliste à une espèce d’egotrip limite ridicule.
Je me rappel d’une discussion avec Arthur de Chaviré il y a quelque temps où l’on constatait que l’on passait souvent dans dans notre scène d’un discours original qui dépeint une réalité à un folklore repris dans la forme par des personnes qui n’en vivent pas le fond, ou comment la réalité influence le propos qui fini lui même par influencer la réalité à son tour. On parlait bien évidement de violence dans le hardcore mais ça fonctionne autant à mon avis pour l’emokid qui joue les losers sentimentaux que pour le groupe de poppunk qui te raconte les joies et peines de la vie sur la route après à peine 6 mois d’existence. Il y a plusieurs passages à ce propos dans le livre de Flanagan, qui constate que les textes de Cro-Mags (particulièrement ceux de The Age Of Quarrel) qui venaient directement de leur expérience de zonars dans les ghettos mal famés du NY de la fin 70’s/début 80’s, donc emprunts de la violence du contexte où l’auto-défense était nécessaire à la survie au sein des rues envahies de gangs plus brutaux les uns que les autres, ont influencés la seconde génération NYHC qui elle venait principalement de quartiers plus aisés et beaucoup plus tranquilles. Ces derniers ont du coup perpétué une tradition violente hors contexte qui a fini par pourrir cette scène et qui perdure jusqu’à chez nous quelques décennies plus tard. Flanagan est bien remonté contre ça, à juste titre. De quoi remettre en place tout ceux qui fantasment sur l’époque où le hardcore était dangereux, alors qu’on a eu depuis un paquet d’occasions de lui donner un autre sens plus adéquate avec nos vies et notre environnement. Comme m’a dit une fois Tony Adolescents, “Profitez du fait de pouvoir être punk sans avoir à vous faire tabasser en concert par d’autres punks ou les flics, sans voir vos amis mourir de coups de couteaux, d’overdose ou du sida, vous vivez une époque beaucoup plus intéressante que la notre”.
A lire donc pour les fans de early hardcore, de Cro-Mags évidemment, pour les amoureux de NY et les amateurs de biographies hallucinantes, une grande partie du contenu vaut quand même bien le fait de passer outre les passages relous inintéressants et le narcissisme de Mr Hard-Core.