Stendhal, écrivain talentueux du XIXème siècle, exprimait avec une parfaite justesse qu' "un roman est comme un archet, la caisse du violon qui rend les sons, c'est l'âme du lecteur". Partant, chacun devrait trouver en un récit digne de ce nom le miroir de son existence, ce souffle de vie qui transcenderait son corps et son esprit pour atteindre des hauteurs indescriptibles. Là demeure le caractère indicible et indéfinissable du genre romanesque. Des Hommes de lettres comme Camus, Gary ou encore Balzac, pour se limiter aux écrivains français, restent des exemples parfaits de cette possibilité de tutoyer la perfection à travers les lignes de leurs écrits. Claude Michelet avait lui aussi déjà su se hisser à des niveaux élevés en rédigeant notamment sa célèbre saga des Vialhe. Restait à savoir s'il était parvenu à renouveler l'essai avec Ils attendaient l'aurore, objet de la critique.
Ledit roman s'inscrit dans le cadre d'une période trouble, celle postérieure à la débâcle française de la Seconde Guerre Mondiale, entre 1940 et 1945. L'histoire traite de trois amis d'enfance qui tenteront de mener leur barque dans cette France occupée. Le premier est un jeune résistant de la première heure, survivant plus que vivant, luttant pour la conservation de son réseau au péril de sa vie. Le second, étudiant et auteur collaborateur, est un adorateur du Maréchal Pétain vouant une haine viscérale et infamante à l'égard des personnes juives. Le dernier, quant à lui, est un pacifiste adorateur des doctrines antimilitaristes, ne désirant choisir aucun camp politique. A cette époque, les instants sont confus. Chacun peut côtoyer, à chaque coin de rue, résistants et collaborateurs en prenant pour habitude de maintenir le culte du secret afin d'éviter tout incident malencontreux.
Disons le tout de suite, ce n'est pas l'originalité qui a gouverné Claude Michelet en choisissant de faire reposer son récit dans ce cadre historique. Les romans ayant pour toile de fond le second conflit mondial sont légions et demeurent encore aujourd'hui des classiques de la littérature européenne et mondiale.
Quant aux personnages, on ne peut que déplorer la volonté de l'auteur de mettre l'accent exclusivement sur les personnages du résistant et du collaborateur, en excluant quasiment celui du pacifiste. En effet, on ne compte plus les romans traitant de cette période racontant le récit de tels individus. Ils attendaient l'aurore fait alors doublon avec l'intégralité desdits livres sans apporter une touche ou un style qui permettrait de se démarquer en proposant un fragment novateur qui ferait le sel de l'écrit. En un mot, même si la proposition initiale semblait alléchante, les attentes font pschitt au bout d'une poignée de chapitres.
Concernant le style du récit, parlons-en ! En dépit de quelques fulgurances fugaces, un agglomérat de dialogues insipides - tenants souvent d'une succession de monologues ou d'apartés - se succède à des descriptions dignes d'une rédaction écrite par un collégien. L'ensemble est fade et sans saveur tant le choix d'écriture alourdit le récit pour rendre la lecture difficile. Le lecteur a l'impression de lire une oeuvre écrite par un auteur débutant dans la profession qui ne demande qu'à parfaire sa patte.
Bref, Ils attendaient l'aurore est loin du trésor attendu et vous laissera, à coup sûr, sur votre faim. Partant, plutôt que de perdre son temps en feuilletant ce roman, d'aucuns préféreront se tourner vers Un sac de billes de Joseph Joffo ou Inconnu à cette adresse de Kressmann Taylor qui, quant à eux, ont su traiter de cette même période historique à travers un prisme novateur et digne d'intérêt.