Dans la touffeur de l’été qui n’en finit pas, le double récit, écrasé de soleil et de lumière, de Philippe, le « grimpeur d’arbre ». Le dernier roman – mais est-ce un roman ? – de Christophe Bataille.
Christophe Bataille est né en 1971 à Versailles. Après des études de gestion à H.E.C. Paris, il travaille 2 ans à Londres en coopération pour L'Oréal, alors qu’il écrit son deuxième roman, Absinthe (1994, prix de la Vocation), suivant le succès du premier, Annam (1993), bien accueilli par la critique (Prix Louis-Barthou, prix du premier roman et prix des Deux Magots, 1994). De retour à Paris, il entre dans le monde de l'édition (Grasset) tandis qu'il continue d'écrire. Depuis janvier 2007, il soutient Bibliothèques sans frontières, une ONG qui vise à faciliter l'accès au savoir dans les pays en développement.
La Brûlure, 2021, est son treizième roman.
Christophe Bataille nous propose un récit en deux parties ayant pour point de départ la terrible "mésaventure" de Philippe, élagueur de son métier et, par ailleurs, cousin de l’auteur, qui, un jour de fin d’été, a subi en haut d’un arbre, des centaines de piqures de frelons asiatiques et les longs jours entre la vie et la mort qui ont suivi.
À moins de n’avoir rien compris, la première partie du livre est une suite de très courts chapitres aux phrases d’une concision toute poétique où s’entrecroisent les souvenirs de Philippe et de sa bien-aimée. Ne sommes-nous pas dans l’esprit toujours en éveil de Philippe, plongé dans le coma de la douleur et de la morphine ? N’assistons-nous pas aux monologues de sa compagne qui, jour après jour, dans le tête-à-tête de la chambre d’hôpital, ne cesse de lui prodiguer des mots d’amour pour le retenir parmi les vivants ? Un duo lyrique, amoureux et sensuel qui tiendra sa promesse, et ramènera à la vie l’être aimé.
La seconde partie permettra à Philippe, le cousin élagueur, de déployer un hymne aux arbres – « L’arbre de chacun fait le paysage de tous. » – à la vie, à l’univers tout entier… mais aussi un avertissement, lyrique et emporté, devant la menace d’une autre brûlure, celle d’un monde aujourd’hui calciné par notre faute, les gaz à effet de serre, les forêts brûlées, les blés desséchés où disparaissent les insectes, où se raréfie la neige, où se perd la raison.
Je me suis laissé porter par le lyrisme poétique, échevelé, désordonné de ce « Chant d’amour » entonné dans la solitude de la chambre de souffrances : « Je veux être ici à ton réveil, avec ma robe et mes cheveux dans les tiens. Je veux que toute mon envie passe en toi. Je veux être le cocon, l’essaim, bientôt l’ombre où tu transpireras. »
Quel homme peux résister à une telle déclaration ?
Comme quoi la littérature peut, parfois, transformer les plus atroces douleurs en havre de douceurs…