Bien qu’ayant succédé à Hemingway, l’Islandais Halldor Laxness n’est sans doute pas le plus connu des lauréats du prix Nobel. Avec La Cloche d’Islande, il entreprend la lourde tâche de redonner ses lettres de noblesse à la littérature de son pays.
C’est que ce petit pays jadis colonisé par les vikings avait connu un long sommeil après le moyen-âge (XIIIème siècle environ) pendant lequel avaient été consignés quelques trésors, notamment les Eddas, contant entre autre les aventures des dieux et du fameux Sigurd, et les Sagas, récits semi-historiques de la colonisation de l’Islande.

L’histoire est celle de Jon Hregvidsson, un « croquant » condamné à mort pour le supposé assassinat du bourreau du roi de Danemark, venu pour confisquer la cloche du village.
Tout en se centrant sur cette histoire marquée temporellement et géographiquement, Laxness touche à un thème relativement universel. C’est la lutte des petits et des soumis contre ceux qui les exploitent (les Danois en l'occurence, mais au fond peu importe) et les oppriment. Car oui l’Islande au XVIIIème siècle, c’est la dernière roue (même plus que la cinquième…) du carrosse : les paysans sont considérés comme des moins que rien, les pécheurs soupçonnés de marchander avec les puissances étrangères, les maladies comme la lèpre sont encore endémiques, et l’activité volcanique fait que le pays est plus ou moins considéré comme l’antichambre de l’Enfer.

Il faut sans doute parler du style : l’auteur est marqué par les sagas de son pays, et donc on retrouve ce quelque chose de laconique, concis et distant, parfois mêlé d'humour noir… mais pas seulement. Laxness peut aussi bien passer d’un style picaresque (dans le premier tiers), faisant presque penser à Don Quichotte, à quelque chose de plus extatique et théâtral, dans la deuxième partie notamment. Des variations qui évitent au récit de tomber dans une certaine lourdeur que l’on peut parfois trouver dans les romans réalistes ou naturalistes.

L’histoire se déroule en trois temps : la première partie très rythmée est consacrée à l’odyssée (!) de Jon Hregvidsson, la deuxième plus lente à la « vierge claire » Snaefrid et la dernière aux événements de Copenhague.
Jon, Snaefrid et Arnas Arnaeus tentent chacun à leur manière de sauver leur pays où de lui redonner sa dignité, mais leurs intentions vont parfois les faire s’opposer les uns aux autres. La situation devient plus complexe dans les deux dernières parties de l’histoire, Snaefrid devant faire face à toutes sortes de difficultés dont la pression de son évêque (dans des dialogues remarquables, on ressent toute la fierté de l’âme nordique qui place l’honneur et la liberté aussi haut que la soumission à Dieu); et Arnas n’atteint pas réellement ses buts.
Même si le récit s’essouffle légèrement sur la fin, globalement Laxness nous offre là une œuvre à hauteur d'homme, vibrante de l’âme de son pays et qui concilie magnifiquement tradition et modernité. Une belle lecture.
Silentium
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le 28 mai 2013

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Florent

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