Pierre Pitron est un journaliste spécialiste de la géopolitique des matières premières. Dans cette enquête il aborde d'abord la question de l'incohérence de la transition écologique et numérique. Ensuite il détaille la stratégie chinoise de monopolisation des ressources et le manque de réaction de « l’Occident ». Puis il dresse une tendance des stratégies de gestion des ressources de métaux rares par les pays dits en voie de dvp, assez similaire à celle de la Chine, et l’impact que ça va avoir sur les relations internationales. Enfin il fait un petit focus sur la France dans tout ça.
Vraiment convaincue par son enquête, c'est très bien documenté et la lecture est fluide. Par contre je suis pas entièrement convaincue par certaines de ses conclusions, enfin hormis l'épilogue où il dit que la solution c'est sans doute de limiter notre consommation.
De son point de vue il faudrait recréer des mines en France, pour soutenir la "transition énergétique et numérique" et notre consommation technologique. Pour moi ça n'a rien d'un projet écologique, c'est du capitalisme vert.
D'ailleurs il démonte, de façon très convaincante, les moyens de cette transition au début du livre.
Payer quelques euros de plus pour avoir un produit made in France, écoresponsable et respectueux de ses employés : oui.
Mais je doute que ces mines françaises seraient tenues par une Scop, ni même par une entreprise publique proposant une rémunération digne. Vu l'état de la classe politique française, profondément néolibérales, ces mines iraient plutôt engraisser des puissances financières privées peu scrupuleuses socialement et écologiquement.
Petits extraits sur les effets de la création de mines en France selon lui: "En d'autres mots, notre empressement à circonscrire la pollution serait tel que nos progrès environnementaux seraient fulgurants, et nos modes de consommation à tous crins réduits." et "Ainsi, l'écologie chinoise sortirait gagnante de cette compétition par le haut imposés par les occidentaux".
Pour moi c'est une vision fantasmée de nos capacités. Les associations écologistes et les consommateurs responsables n'ont déjà que peu de moyen. Les instances publiques chargées de veiller à la sécurité environnementale sont peu efficaces, quand on ne passe pas carrément au-dessus de leurs têtes pour des intérêts économiques. Les consommateurs responsables ne savent plus où donner de la tête et n’ont pas un porte-monnaie extensible à toutes les cause. Nos progrès dans d’autres domaines ne sont pas fulgurants et entachés d’erreurs malgré la pression de l’opinion. Et la mobilisation des chinois sur les questions environnementales prend déjà de l'ampleur sans que ça ait plus d'effet que chez nous.
Même si je partage pas son point de vue sur ce point, c'est un bouquin convainquant, passionnant à lire et je le recommande fortement à ceux qui s'intéressent aux vices « cachés » de la transition énergétique et numérique et aux guerres économiques.