La Tristesse des anges par CathyB
Quelque part dans le Nord de L'Islande, à la fin de l'hiver. Jens la postier arrive dans la maison d'Helga gelé, scellé à son cheval par la glace. A peine a-t-il le temps de se remettre qu'on lui confie une nouvelle tournée vers les fjords du Nord, dangereux en cette saison. Pour réussir, il devra passer par voix de mer, lui qui a peur de naviguer. Alors on demande au gamin de l'accompagner.
Le gamin, c'est cet orphelin qui qui vit chez Helga depuis quelques semaines. Amoureux de poésie, promis à une solide éducation dès son retour, il découvre à peine l'émoi que peuvent provoquer les femmes.
Tous deux vont devoir affronter une nature hostile, où les tempêtes font rages, et où la famine guette les fermes isolées à l'approche du printemps.
C'est beau. Vraiment. L'écriture fluide nous emporte au gré des bourrasques, et on se laisse porter par cette langue très poétique. La poésie est d'ailleurs omniprésente dans ce roman, l'auteur ne cessant de s'interroger sur son rôle et celui des livres. Il émaille le récit de réflexions sur la vie et l'écriture ; exercice un peu casse-gueule, qui pourrait alourdir le texte, mais ici tout s'enchaîne assez naturellement, les généralités de l'auteur enrichissent le récit plutôt qu'elles ne le plombent.
La grande force de roman, ce sont les personnages : Jens, le gamin, leurs familles, amis, mais aussi les gens qu'ils croisent dans les fermes isolées du grand Nord... Tous sont attachants. L'auteur arrive à leur insuffler à chacun une vie propre et le petit supplément d'âme qui fait que l'on se prend à repenser à eux une fois la lecture achevée. L'histoire est simple, mais elle est surtout prétexte à aborder des sujets essentiels : la vie, la mort, la survie, l'homme face à la nature, la cruauté de l'existence, l'amour, le cœur des hommes...
Après, ce livre a également les défauts de ses qualités. C'est très beau, très lent, mais c'est parfois un peu chiant. Certains passages traînent en longueur pendant que d'autres se répètent inlassablement (ils affrontent la tempête, Jens part devant, le gamin s'égare, il va mourir, Jens le retrouve au dernier moment, il s'excuse... à la quatrième ou cinquième fois, ça devient un peu lassant). Du coup, on se prend parfois à vouloir sauter des pages.
***SPOILER***
Et puis je reste pas mal remontée par la fin. Après nous avoir fait voyager si longtemps et aussi intimement avec ces personnages, après nous avoir fait entrevoir l'importance de leurs vies (Jens comme seul soutient de sa famille, le gamin avec un brillant avenir qui se profile), après les avoir vu se relever encore et encore, les tuer de manière si abrupte au détour d'une page, c'est quand même vache.
Alors oui, je sais, c'est une belle métaphore du tragique de l'existence, de la mort qui ne frappe forcément au meilleur moment, qui ne choisit pas... N'empêche, je trouve ça bien cruel, et ça tranche nettement avec la lenteur des presque 400 pages qui précèdent.
***END OF SPOIL***
Dans l'ensemble, ça reste quand même un excellent roman. La lecture est parfois un peu éprouvante, mais beaucoup de réflexions sonnent juste, on est vraiment plongé dans l'atmosphère de ces landes glacées et de ces fermes étouffantes. Et surtout, on se reprend à y penser des semaines après avec l'impression d'avoir lu quelque chose d'essentiel.
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