Preux au lit.

Ce très court récit est plus sexuel que courtois. Il n'est pas sans évoquer Barbe-Bleue, dans un registre bien différent. Si Gauvain met un point d'honneur à coucher avec la fille, c'est qu'à l'évidence sa réputation en dépend, ce qui signifie que la "prouesse" chevaleresque contient une composante sexuelle, inhabituellement nette dans ce récit.

La féérie est présente grâce à l'épée magique, dont on sait ensuite qu'elle devait épargner le meilleur de tous les chevaliers qui se présenteraient. La proposition du chevalier qui invite Gauvain n'en est pas moins insolite: quel père irait racoler des inconnus dans la forêt pour aller les installer dans le lit de sa fille ? Certains ont vu là-derrière des désirs incestueux refoulés de la part du père; des désirs passant par le voyeurisme, peut-être.

Au fond, le plus savoureux, c'est le contraste entre le portrait idéal fait de la fille (belle, courtoise, et tout et tout...), et son attitude quand, à peine sortie du lit avec Gauvain, elle préfère sans justification le premier ravisseur qui passe.

Le récit se conclut sur un thème fort cher au Moyen Âge: la misogynie: plus vous en faites pour les femmes, plus elles vous jetteront. Elles sont fausses, perfides, etc. On est assez loin du registre courtois christianisé....