Tragique et plombant sujet que la perte brutale d'un fils unique. Pour alléger ce livre qui se veut naturellement encombrant, j'ai supputé que Michel Rostain avait, en habile technicien, tenté de sauver préventivement ses lecteurs de la noyade. Pour cela, il entrecoupe son œuvre de courts paragraphes, permettant d'avaler le poison à coups de menues gorgées. Il distille quelques notes d'humour dans son récit et présente le désespoir ravageur du père à travers le regard nettement plus tiède de son enfant.
C'est là que le bât blesse : s'il s'agit d'une manœuvre de l'auteur visant à éviter de sombrer dans le pathos – il est vrai que la souffrance des parents est en soi largement... suffisante -, ce fils presque neutre, qui observe en omettant de partager son ressenti, m'est apparu comme faux.
La construction du roman est techniquement réfléchie, le style est sobre et efficace, mais j'ai à déplorer un manque : la compassion du fils. Comment cet enfant peut-il constater la peine dévastatrice de ses parents et rapporter leurs sanglots sans cesse renouvelés sans sembler s'en émouvoir une seconde?
Ça ne fait pour moi pas l'ombre d'un doute, ce livre a brillamment évité l'étiquette « pathétique ». Cependant, le fait de ne pas avoir pris en considération le ressenti difficile de toutes les parties – c'est-à-dire la faiblesse du fils aussi – rend ce récit insondable et invraisemblable.
Enfin, j'ai trouvé les ruptures temporelles et les coupures narratives trop nombreuses. Elles aident le lecteur à ne pas devoir maintenir l'attention trop longuement sur des anecdotes pesantes, mais elles empêchent en même temps de rentrer tout à fait dans le récit et d'y adhérer...
Autant de raisons pour lesquelles ce livre ne m'aura, hélas, pas vue ni frémir ni pleurer.