J'ai tellement de livres à lire, et tellement de classiques à emprunter à droite à gauche que je suis rentré depuis maintenant un bout de temps dans une phase où je n'achète presque plus de livres, le temps d'écouler mon stock. Et pourtant, j'ai acheté le meilleur des mondes. Il faut dire qu'après avoir découvert 1984 l'année dernière, qui mérite plutôt bien ses 9.1 de moyenne éclaireur, j'avais hâte de découvrir un autre "monument de la dystopie", à savoir Brave New World, de son nom original, et ses 8.2 de moyenne éclaireur. Je me le suis donc acheté, et il est peu dire que la déception fut grande.

Le meilleur des mondes ne fait que 320 pages, et pourtant Dieu qu'il m'a semblé long. La dystopie mise en place par Huxley est difficilement critiquable, tant elle est impressionnante ; d'autant plus que l'auteur est réellement un précurseur, plus encore qu'Orwell (son livre est sorti en 1931). Cette société où tout le monde nait en bocal, où tout est conditionné pour que tout le monde soit heureux, tout le temps, et que pour que tout marche bien, tout le temps, est relativement fascinante. Les différentes problématiques soulevées (si tout le monde est heureux, pourquoi être libre et potentiellement être malheureux ?) sont intéressantes. Le problème, c'est que le meilleur des mondes est un roman bien plus qu'une dissertation dystopique. Et un roman plutôt médiocre.

1984 est relativement moyen durant une bonne partie de ses péripéties, mais se rattrape par une boucle finale et totale incroyable, et certains passages analytiques sont tout simplement fascinants (quand Winston découvre et lit le livre). Le meilleur des mondes à un fond génial, mais il n'arrive pour moi pas à en faire quoi que ce soit. C'est bien simple, le roman d'Huxley n'est jamais passionnant. Le début est d'un ennui sans pareil (les bébés naissent dans des éprouvettes et sont conditionnés, c'est horrible et contre-nature, c'est bon on a compris, pas besoin de 50 pages), et quand l'histoire commence enfin c'est pour se rendre compte qu'elle n'est pas plus intéressante que les interminables descriptions de l'auteur.

Les personnages sont tous stéréotypés, fades et sans intérêt. Alors oui, d'un côté c'est le conditionnement qui veut ça, mais le déroulé des péripéties ne met à aucun moment en avant les horreurs de cette dystopie si originale. Alors il y a bien quelques moments intéressants, comme celui à l'hôpital dans le dernier tiers, le rassemblement final, complètement fou, ou bien encore la dernière discussion avec l'archi-chantre, mais jamais Huxley n'aura réussi à me maintenir hors de la torpeur dans laquelle son livre finissait invariablement par me plonger.

Même la partie qui m'a le plus intéressé (la discussion suscitée) a fini par me courir sur les nerfs : sérieusement, à quoi rime toutes ces citations ? Alors oui, Shakespeare a écrit des choses magnifiques, surtout en VO (et à ce titre il est très appréciable que le traducteur ai pris la peine d'annoter la traduction avec les vers originaux), mais à part à remarquer à quel point Shakespeare rend mal en Français, à quoi servent ces citations ? Que Huxley se touche sur le bonhomme, dont il doit être extrêmement fan, pourquoi pas, mais au bout de la 150ème citation en dix pages juste stop quoi. Et d'ailleurs, stop c'est généralement ce que je faisais. Jusqu'au lendemain. Et puis rebelote le lendemain. Et le surlendemain.

Le meilleur des mondes n'a finalement pour lui que son univers, et les réflexions sous-jacente que ce-dernier apporte. Le roman ne met que trop rarement en valeur sa dystopie, n'attire jamais le regard du lecteur sur elle. Ce-dernier doit faire le travail lui-même et, alors même que j'écris ma déception, je ne peux m'empêcher de reconnaître encore une fois les qualités de cet univers. Mais voilà, le meilleur des mondes n'est pas intéressant à lire, et trop d'importance est accordée à sa forme fade, à son histoire stéréotypée et ratée, ou encore à son style qui se veut brillant mais qui ne l'est jamais. La dystopie, objet central de l'œuvre, finit par devenir presque secondaire. S'il reste intéressant pour la culture et pour l'histoire, je ne recommande donc pas la lecture du meilleur des mondes de nos jours. Moi qui voulais attaquer la nouvelle année sur une belle découverte, c'est raté.
VGM
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le 3 févr. 2015

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