Intéressons-nous ici à un genre que je ne connais pas forcément très bien, à savoir le polar français, avec ses clichés de Paris, ses flics aux noms improbables de banalité (genre Lucien Bonnepate) et ses intrigues foireuses. Sauf qu’ici, on évite le gros de ces écueils.
Tout d’abord, le Méchant, puisque sans Méchant crédible, ça n’est même pas la peine d’ouvrir le bouquin. Donc, ici, on est confronté à Arnaud Lécuyer, pédophile d’une incroyable dextérité qui utilise ses dons de manipulation pour fasciner les jeunes garçons et les entrainer vers la mort. Un personnage froid, psychotique mais profondément malin et très conscient de la nécessité pour lui de faire profil bas s’il ne veut pas se retrouver en prison. Face à lui, un flic fan de jazz et rompu aux techniques du FBI, Ludovic Mistral. La plus grande force de ce roman est, à mon sens, de ne pas privilégier le sensationnel au détriment de la crédibilité : même s’il est un monstre, Lécuyer ne tue pas tous les enfants qu’il croise ; Mistral, quant à lui, se fait mettre la pression par le préfet de police et n’a guère de Deus Ex Machina pour l’aider à trouver le suspect. On est donc ici dans la cohérence, loin des effets de style des polars américain, mais ça n’est pas plus mal, pour une fois. Le côté très français du roman policier, qui plombe parfois l’intrigue par une trop grande banalité et platitude, est ici bien maitrisé, et on lit ce livre avec un réel plaisir, sans compter que la narration « colle » vraiment aux personnages.
Une très bonne surprise, en résumé.