Une sorte d'incapacité à voir les choses
Où ce roman commence-t-il ? Aux Etats-Unis où le brillant chirurgien immigré fonde une famille et fait carrière, ou bien en Afrique de l’Ouest où se concentrent les origines du mal comme les sources d’apaisement ? Le personnage central est probablement le père, Kweku, pilier et modèle familial jusqu’au jour où une injustice professionnelle fait basculer son équilibre et l’équilibre de sa famille. A moins que le personnage central ne soit la mère courage, Folà, soutien effacé de l’époux jusqu’au moment où elle doit assumer seule ses enfants et devient celle qui rassemble. Ou alors Olu, le fils aîné qui suit les traces du père pour faire encore mieux… Et pourquoi pas les jumeaux Taiwo et Kehinde, personnalités exceptionnelles à l’adolescence déchirée… Ou encore Sadie, le petite dernière qui ne sait pas quelle place prendre … ?
La culture africaine est omniprésente. A travers l’histoire de la famille Saï, il est question d’êtres déracinés qui cherchent désespérément une lignée. C’est aussi l’histoire de blessures intimes qui ne peuvent se réparer qu’au prix de retrouvailles familiales difficiles. Il y a des allers-retours permanents entre les Etats-Unis et l’Afrique de l’Ouest, entre les personnages et entre les époques. Petit à petit se comprennent les choix et les comportements. Rien n’est laissé au hasard et des détails prennent sens : des pantoufles, des fleurs, la danse africaine,… Voici un beau roman dense, intelligent et sensible, dont le titre exprime bien toute la subtilité.