A l'époque l'affaire Rey-Maupin m'avait captivé. Lorsqu'en 2006 sort un roman sur cette affaire, je me jette avidement dessus. Et, c'est la consternation ! Je ne sais pas quel degré de saloperie il faut avoir en soi pour écrire un roman pareil ! Qu'on délire un fait divers ne me dérange pas. Mais qu'on en fasse une fable moralisatrice, étant assumé par ailleurs que ledit ouvrage, est une fiction, c'est révoltant !

C'est révoltant d'une part parce que réduire l'extrémité des actes d'un couple à une somme psychologique, c'est précisément retirer à ses personnage leur tragique et, d'autre part, puisque tout ce qui concerne l'intimité est inventé (la part fictionnelle), il devient non seulement facile, mais encore lâche, non seulement pratique, mais encore manipulateur, de créer (en réalité de plaquer sur les protagonistes d'une histoire écrite déjà, toute la psychologie de comptoir, et dégueulasse, et mesquine) des personnages qui viendront illustrer un propos bien consensuel, de ranger le dérangeant dans les petites cases du connu, de bien digérer l'incomestible et d'en vomir une écriture du mensonge et de la bassesse. Une écriture basse et contente d'elle-même.

Mais je n'ai encore rien dit du style, là ! On ne peut se planter au point qu'un propos navrant et misérable soit servi par un style brillant. Une cohérence nécessaire veille à bien organiser les choses et, bien entendu, la même misère vient se loger dans les mots dont on peine à franchir les espaces. Un bon exemple valant mieux qu'un long discours, permettez-moi (l'oserai-je !) de vous faire goûter l'exception de ce cru :

"Elle ne veut pas le décevoir, comme à chaque battement de son cœur, elle mourrait de le décevoir.
Lui non plus ne peut pas la décevoir. Il s'est donné l'image du héros dur, de l'homme d'action capable de braver la société ; jamais il ne pourrait offrir au regard de son aimée la moindre faiblesse.

LA VERITE EST LEUR PREMIERE VICTIME"

(c'est moi qui souligne.)

Quand on a écrit ça, on ne peut plus se sauver, je crois ; et quand on l'a lu, on peut aussi bien vouloir crever, alors pourquoi pas en allant tuer des flics, ou des écrivains !
reno
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le 10 sept. 2011

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reno

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