Il y a des histoires d'amour ; pourquoi n'y aurait-il pas des histoires de haine ?
La famille de Jean-Pierre n'est pas très intéressante, pas très sympathique et pas très heureuse. Il vit dans une cité, s'amuse à la récré à embêter le meilleur de la classe avec ses deux meilleurs copains, part en vacances avec le secours populaire et regarde la finale du foot à la télé avec ses trois frères et son père qui crie très fort pendant que maman prépare les frites. Jean-Pierre pense tout le temps, il commente tout mentalement, dans sa tête il n'y a jamais le silence. Pendant plus de quinze ans, c'est Jean-Pierre qu'on retrouvera çà et là, entre le premier jour d'école et le boulot en CDI. Mais Mimi ne raconte pas vraiment l'histoire de Jean-Pierre.
Ouvrant grand les portes de la conscience de "JP", Sébastien Marnier nous livre les cogitations de ce personnage translucide au travers duquel on observe, déformé, teinté, un autre personnage. L'auteur met au centre de ce roman brutal la question de l'identité. Sa construction bien sûr, mais pas seulement : Mimi est une histoire de possession, de masques et de conflits intérieurs. Et surtout, Mimi raconte cette haine comme une poix froide sur le monde entier et qui empoisonne tout : les filles, le sexe, la famille, le travail, et surtout qui remplit ce personnage mal-aimé qui s'en sert comme d'une armature. Cette haine qu'on reconnait peut être plus qu'on ne voudrait, qui ne nous choque pas autant qu'on aurait aimé.
Je n'ai pas été enthousiasmé par ce livre. Le style est volontairement pataud, verbatim puéril d'une réflexion volontairement à la surface des choses. Mimi est autant fait de phrases de trois mots criblées de points d'exclamation que d'autres à la longueur proustienne, sans en avoir (volontairement ?) la hauteur. La vulgarité qui pèse sur l'ensemble pourrait presque faire passer inaperçue une certaine complexité dans la construction. La véritable histoire de Mimi se lit entre les lignes, en négatif. Hélas, les fausses pistes ne tiennent pas longtemps la route, et on précède rapidement le personnage dans sa réflexion. Cela donne une courte nouvelle de 457 pages, lente et poussive. Mais qui se lit facilement, il faut le reconnaître.
JG