Il y aura des spoils dans cette critique.
Oui, il y a plein de choses dans ce livre. A tel point qu'à un moment donnée, les imbrications complexes des narrateurs et des histoires m'ont fait penser à Jacques le Fataliste (c'est quand même pas mal ! Même si ça m'a donné mal à la tête).
Or et nuit porte bien son nom. Les mille et une nuits, mais avec plus de baston, de magie (quoique, est-ce possible?), avec un fil rouge plus important, et une histoire tragique qui se dirige inéluctablement vers sa fin, mais...
... Je retrouve ce défaut, que j'ai déjà trouvé dans d'autres livres, souvent les premiers de leurs auteurs : je n'ai pas cru une seconde aux personnages.
Qui a-t-on, finalement? La reine conteuse en mal d'aventures, snob et fière, mais fragile et, visiblement, en mal de bras virils de brigands pour la secourir et l'aimer (ou comment Shéhérazade a perdu toute sa crédibilité en deux paragraphes). Le brigand, fier et éduqué, donc en fait ça n'est pas vraiment un brigand, et finalement il a un grand coeur. Ben ouais, Shéhérazade ne pouvait pas succomber au charme d'un bête rustre ! Et puis, dès lors qu'il s'avère avoir un peu d'éducation, elle lui tombe littéralement dans les bras... on aurait apprécié un juste milieu.
On a aussi le jeune roi-dragon, hanté par un sang maudit mais puissant, qui est au fond un pauvre adolescent mal dans sa peau et en manque d'amis. Et son ami, autre adolescent mal dans sa peau, et avec une mère LEGEREMENT envahissante, mais pas tant que ça, ce qui fait que quand elle devient une grosse méchante à la fin, on s'en contrefiche un peu... ah ben oui, la vieille mégère qui devient un dragon, subtile métaphore.
Et puis le prince qui tombe amoureux de manière cliché de la cousine de son ami, le prince qui devient méchant de façon cliché, l'ami qui, on ne sait guère pourquoi, ne réagit pas à sa mère en train de charcuter son ami (fils à maman, je vous dis), et cette fin ! "Attention, un démon millénaire est dans ton sang, sauras-tu résister à son appel?" "euh, ben oui, j'ai résisté à ma mère toute mon enfance!". Moui, enfin sauf quand elle saignait mon meilleur ami à blanc.
Le livre se lit très bien, et a le mérite de se tenir seul (dieeuu merci enfin un livre qui ne dure pas 50 tomes), mais le côté stéréotypé des personnages et de leurs relations ont fait que je ne me suis guère sentie concernée par les retournements de situation et les moments dramatiques. J'ai eu l'impression que l'auteur avait sa vision bien ancrée dans son esprit, mais qu'elle n'est pas tout à fait passée dans son écriture, et du coup, il me manque des éléments pour que les personnages aient une réelle profondeur.
Et puis, franchement, je n'en reviens pas de ce cliché du bandit qui dort à côté de Shéhérazade pour la réchauffer ou je sais pas quoi, et Shéhérazade, telle une adolescente rougissante, qui ne se sent plus. Non, vraiment, ça n'était pas nécessaire.