Tahar Ben Jelloun, en narrant sous la forme d'un petit conte pour adultes l'histoire de Mohamed le vendeur ambulant relativise justement l'héroïsme de ceux qui ont malgré eux conduit au formidable élan humain qu'on été les révolutions Arabes de début 2011. Bouazizi y apparaît en effet comme un jeune homme comme les autres, quoi qu'un peu plus malheureux qui finit à force de frustrations et d'injustices, sans véritable arrière pensée, ou peut-être avec le désir un peu égoïste de se venger de ceux qui l'ont maltraité, par s'asperger d'essence et mettre le feu à ses vêtements. Devenant alors, par le jeu des hasards, des coïncidences et des vases trop plein, la goutte d'eau (paradoxe) par laquelle tout arrive.
Passé cet aspect positif, le petit livre de Ben Jelloun apparaît malheureusement comme une assez triste plaisanterie.
Par son prix tout d'abord, 7,5€ pour une petite nouvelle de 50 pages insipides, ça fait très cher.
Pour son insignifiance, ensuite. Par le feu se contente de décrire en léger différé, en y ajoutant quelques anecdotes du quotidien, ce que vous avez pu lire partout dans la presse il y a six mois, en plus condensé et informatif. Ben Jelloun n'y ajoute ni peinture sociale, ni portrait psychologique, ni réflexion philosophique. Il est le photographe anonyme qui a troqué son smartphone une fois la manif' finie pour une plume.
Pour son côté trouble enfin. Car Par le feu dénonce dans ses dernières pages le comportement des agents qui se sont rué chez la mère de Mohamed quelques semaines après sa mort pour acheter « le scénario de sa vie ». Pourtant, Ben Jelloun raconte la vie de Mohammed, qu'il a du écrire en trois heures, pour 7,5€ et se sert de la vie du défunt jeune homme pour promouvoir l'Etincelle, l'essai sur les révolutions Arabes qu'il a publié en même temps chez le même éditeur. La connexion entre les deux ouvrages s'étendant jusqu'au titre ! Un peu osé non ?
