Coup de coeur
Les restes d’une jeune femme sont soudain retrouvés, près de la rivière qui borde cette petite ville tranquille de Caroline du Nord : il s’agit de Ligeia, disparue quarante-six ans plus tôt, en 1969,...
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le 10 mai 2020
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Les restes d’une jeune femme sont soudain retrouvés, près de la rivière qui borde cette petite ville tranquille de Caroline du Nord : il s’agit de Ligeia, disparue quarante-six ans plus tôt, en 1969, à l’issue d’un été où elle avait fréquenté en cachette les deux frères Bill et Eugène. Petits-fils du tout-puissant médecin, tyrannique et conservateur, qui tenait alors sous sa coupe, non seulement sa famille, mais aussi toute la ville, ils avaient alors été fascinés par la liberté de comportement de cette jeune hippie venue de Californie, qui les avait initiés au sexe, à l’alcool et à la drogue. Cette découverte macabre est pour les deux hommes, aujourd’hui sexagénaires, un fracassant retour du passé, qui va poser de bien sombres questions quant à leur responsabilité dans la mort de Ligeia.
La vérité psychologique des personnages rend parfaitement crédible cette histoire, d’ailleurs inspirée d’un véritable fait divers. Au-delà de l’affaire criminelle qui entretient suspense et curiosité, c’est à une plongée étouffante dans la société de cette petite ville américaine de la fin des années soixante que nous convie Ron Rash, à l’époque où le vent nouveau de la liberté se heurtait parfois violemment à l’autorité conservatrice.
Alors que la méchanceté et la noirceur du grand-père n’en finissent pas d’atterrer toujours plus le lecteur, les portraits de Ligeia et des deux frères prennent peu à peu une densité dramatique dont on sait l’inéluctable explosion, sans toutefois parvenir à s’en figurer le moment ni le comment. L’effet de surprise reste ainsi intact jusqu’au bout, dans un dénouement implacable et glaçant, où le poids de la responsabilité n’échoit clairement pas au plus grand coupable.
Instantané d’une époque en mutation et d’un détonnant conflit de générations, ce récit noir d’une lâche impuissance face à la tyrannie se lit en un souffle. Il vous laisse hanté par la question du doute et de la culpabilité, par cette infinie expiation qui aura été le corollaire d’une liberté chèrement payée. Coup de coeur.
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le 10 mai 2020
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