La culture révolutionnaire fait qu'on respire !
Après une Histoire de la Révolution Française, c'est comme si paraissait aujourd'hui sa version "travaux pratiques", sous la plume du même auteur. Ce livre fait partie des rares essais politiques qui peuvent vous captiver alors même que vous n'en partagez pas systématiquement toutes les orientations.
L'exemple type pour moi a été ce moment où Hazan fusille en règle le principe d'assemblée constituante, et montre, analyses historiques à l'appui, que les constituantes ont presque toujours été des leviers de la contre-révolution pour faire cesser l'insurrection, et faire rentrer le peuple dans "l'ordre" de l'ancien régime. Je ne peux me résoudre à balayer l'idée d'une assemblée constituante, pilier de l'implication citoyenne, et pour autant je me sens instruit de l'usage contre-révolutionnaire qui peut en être fait.
Pour le reste, le meilleur souvenir que je garde c'est indéniablement cette proposition, au lendemain immédiat de la révolution victorieuse, de murer les lieux de pouvoir, ou bien de les faire garder, ou mieux encore d'y installer des crèches, des hammams et des studios d'enregistrement (je cite de mémoire), pour empêcher les anciennes élites de se reconstituer, et de remettre en route la machine de l'ancien régime.
Une interrogation subsiste : qui est ce Kamo, mystérieux co-auteur du bouquin, et qui semble emprunter son pseudonyme à la mythographie soviétique (Kamo étant déjà le pseudonyme d'un compagnon de jeunesse de Staline, mort en 1922) ? Pas de réponse pour l'instant.
L'idée de révolution est tellement malmenée ces derniers temps, dans le climat actuel de résignation monovalente. Ce livre fait du bien ! Il existe une culture révolutionnaire, qui rime avec création, qui rime avec résistance. Tout cela, la pensée capitaliste a essayé de la concurrencer avec des notions voisines, mais incompatibles : l'innovation, le modernisme, et ses odieux avatars que sont la publicité, l'obsolescence programmée ... Pourtant, rien ne résiste à l'examen : la propagande capitaliste nous fait suffoquer, nous frustre, flatte nos plus tristes passions, tandis que les espoirs de la culture révolutionnaire nous font respirer. Parfois, jusqu'à l'ivresse et donc au vertige, certes, mais on respire !