J'avoue qu'au départ le sujet m'intéressait, ce qui est évidemment un plus : la collaboration, la débacle des pétainistes, Céline, les miliciens...
C'est une période qui me passione car tout ce que l'homme avait de pire (mais aussi parfois de meilleur) s'y est développé et d'un point de vue psychologique rien de plus intéressant.
L'angle du roman est bien trouvé : un majordome du château de Sigmaringen chargé de l'organisation des réfugiés français qui arrivent courant 1944 avec le gouvernement pétainiste au complet.
Et ce majordome nous raconte ce qu'il voit et entend : et
quoi de mieux qu'un majordome pour tout entendre et tout voir : les intrigues, les rivalités, les haines...entre individus de même idéologie !
Et comment les gens au pouvoir peuvent manquer de lucidité face au réel !
Ce livre est bien écrit, bien documenté, Sigmaringen est un roman au style assez "classique" mais ce n'est pas un reproche loin de là même si c'est parfois un peu répétitif et que l'action y est peut présente.
Il n'y a pas beaucoup d'actions, c'est vrai qu'on est davantage dans la description psychologique notamment des personnages (Pétain, Laval, Déat, Darnand, de Brion, Céline..)
Pour qui n'a pas une bonne connaissance de cette époque, de la collaboration et des noms cités
ce livre aura forcément un intérêt moindre.
Evidemment une histoire avec un majordome comme personnage central
ce n'est pas très "glamour", c'est même plutôt austère;
Ce majordome allemand, Julius, dévoué à son maître le prince Hohenzollern (lui-même exilé par les nazis) se met au "service" des réfugiés français (pétainistes et autres collabos)
malgré son aversion du nazisme.
Mais il faut dire qu'il a une haute estime de sa fonction et donc quoiqu'il puisse penser
il obéit à ses "maîtres".
Mais comment être anti nazi (avec un secret datant de 1933), être guidé par certains principes,
être également obnubilé par la volonté de bien servir, obnubilé par ce qu'implique sa tache, son devoir et donc tenu d'en dire le moins possible et de ne montrer aucun de ses sentiments ou de des pensées, de rester imperturbable ? Tout cela est remarquablement raconté par Assouline.
L'histoire sentimentale entre le majordome et Jeanne donne un peu de "piment" au roman mais l'intérêt principal de Sigmaringen ne réside pas là, l'intérêt réside dans la psychologie des personnages et leur manière de réagir face aux évènements.
J'avoue que j'ai bien aimé la fin, le rebondissement inattendu même si cela peut paraître un peu tiré par les cheveux.
Bien sur Assouline aurait pu se contenter d'écrire un essai historique mais encore une fois je trouve l'approche romanesque plutôt réussi et apporte une touche différente sur cette période trouble de notre histoire.