Tenant place dans la facture sociale des grosses années Thatcher avec ses contestations syndicales, un chômage de masse alors tout nouveau et des coupes impitoyables à l'aide sociale, Skagboys se pose en préquelle de Trainspotting près de 20 ans après la publication de ce dernier.
Au delà de sa filiation directe avec le premier roman d'Irvine Welsh et contrairement à Porno, sa suite, Skagboys reprend cette narration découpée et ellipsée de différents moments de vie de multiples personnages pour un résultat qui fleur plus avec la suite de nouvelles à un fil rouge qu'à un roman classique.
Que les fans de la premières heure (c'est moi) se rassurent tout de suite, tout le monde est là.
Le très cher quatuor à flutes: Renton, Sick Boy, Spud, Begbie (les deux derniers tristement trop absent du roman) ainsi que les bons copains et la famille: Tommy, Allison, Billy, Second Prize et autres Nicksy et Forrester seront au rendez vous.
Bien plus tourné vers le mal de siècle que son grand frère, Skagboys souffre néanmoins de faiblesses palpables qui je n'en doute pas auront pu faire décrocher plus d'un lecteur, ses principales étant sa multiplication de personnages dont l'intérêt varie simplement beaucoup trop ainsi que la taille de son volume constitué de ni plus ni moins que de 900 pages et si l'idée de suivre les décantes fables noires tragicomiques de nos amis héroïnomaniaques à de quoi réjouir dans l'idée, sur le papier, la chose est toute autre.
Sans se mentir, Skagboys est simplement trop fourni et pas de la meilleure garniture.
Même si beaucoup de chapitres touchent aux moments de grâce/crasse qui font tout le charme d'Irvine Welsh entre sexualité glauque au possible, qui a vite fait remuer une sous-ventrière coupable, humour noir gorgée de vannes odieuses pas possibles, expressions biens écossaises qui donnent à elles seules un sel incontestable à l'ensemble et drame social viscéralement frontal et choc sans tombé dans le trashouille malgré l'affreux, tout y est.
Mais bien malheureusement tout n'y est pas égal ainsi, aussi bien en qualité qu'en compréhension un bon nombre de ses tranches de vie auraient pu se voir retirer ou écourtées et pour le mieux.
On s'ennuie parfois un peu dans Skagboys et tout y est un peu comme à l'image du Journal de réhab' en fin de de livre:
Un récit sur 45 jours qui si il part d'une bonne idée à tendance à trop s'étendre et se répéter pour finalement se révélé un peu fastidieux à lire.
Pourtant le charme opère toujours et l'écriture dans un langage très familier et personnel à chaque personnage souligné par quelques réflexions d'une rare justesse souvent dans la bêtises reste vraiment agréable mais on ressort de ce long pavé avec la douloureuse impression d'avoir lu une réédite de Trainspotting ou plutôt de ses chapitres perdus, le fait que la chronologie des récits ne soient séparés que par une poignée d'années ajoutant à cet effet.
On en apprend finalement peu de plus sur le fameux quatuor qui ne nous avait pas déjà été narré en 1995.
Pourtant loin d'être une lecture désagréable au premier degrés (très loin de ça, tout de même) Skagboys ne réussi pas à transformer l’essai Trainspotting et il est très difficile de le traiter en incontournable. Il est souvent drôle, percutant, tragique et pose un regard intéressant ainsi que très bien documenté sur les années Thatcher mais encore une fois Bigger is not always better et le résultat se trouve être irrémédiablement hypertrophié.
Une lecture que je ne recommande donc clairement pas à quelqu'un qui voudrait découvrir l’œuvre de l'écrivain mais qui pourra tout de même ravir ou tout du moins contenter les fans de Welsheries et ceux en manque d'une lecture du bonhomme au crâne chauve.