J'ai lu les premières critiques en anglais déglinguer le style lapidaire et heurté du bouquin, presque télégraphique. Finalement, ce rythme d'écriture par salves, impressions vives, raccourcis et brisures nettes confère à Riposte une saveur assez rêche et brutale qui offre une nouvelle dimension à l'univers SW. Le traitement est réaliste, violent, les motivations et sentiments des personnages nous sont très (trop ?) proches et la barrière entre la geste épique de héros et le lecteur s'effondre pour nous proposer des rescapés du naufrage impérial face à leurs échecs, regrets, contradictions.
On vire plus du côté du roman d'aventure noir, avec ses gueules cassées, ses rebelles plein de doutes, ses anonymes projetés dans la lumière, ses truands qui cherchent le sens du vent qui tourne, ses Impériaux divisés dont, pour certain, l'idéal politique et social n'est pas moins défendable que celui de la Nouvelle République.
J'ai trouvé ça étonnamment enlevé, visuel et conscient de devoir balayer les lieux communs et la possible mièvrerie des gentilles scènes de victoire du Retour du Jedi. C'est un livre sur la collision entre l'histoire de petites gens et les énormes enjeux de la mort de l'Empereur. Original ? Non, mais correctement traité, rehaussé de détails et de distorsions pour chaque personnage qui leur donnent du relief, le tout dans le contexte plus large d'une vision politique, militaire et sociale de la ruine de l'Empire, bien plus lente, mesurée et nuancée, que la simple explosion d'une station de combat.
On nous vend Rogue One comme le volet sombre, réaliste et violent de la saga. C'est un peu l'effet que m'a fait Riposte, avec ses scènes de rue, ses trahisons, ses lâchetés, ses combats sanglants et ses détails saugrenus, sordides ou intimes sur la vie des protagonistes. On n'a pas vraiment le nez tourné vers les étoiles, mais bien le museau dans la boue, avec un recul cinglant par rapport à l'aspect habituellement lisse et policé de l'univers. Décapitations et allusions sexuelles... C'est un autre monde, on peut trouver ça trivial, mais c'est une vision fraîche et bienvenue.
Au niveau du fond, c'est plus léger. Nous sommes sur un constat, une simple situation, une épopée de quelques heures qui essaie de présenter un tournant décisif mais sans réellement y parvenir. Le monde n'évolue pas sensiblement et le sens des actes des protagonistes se perd dans l'anecdote.
Un élément qui joue en la faveur de Riposte est son statut de source officielle du nouvel univers étendu. On a enfin du biscuit solide, validé, intégré à la storyline et les références à Calrissian, au niveau 1313 de Coruscant, au blocus du secteur Anoat par le Gouverneur Adelhard (tirée du jeu SW - Uprising) font fatalement plaisir. La mosaïque bordélique de l'UE se reconstruit sur des bases plus rationnelles et je trouve ça assez encourageant.
Je regrette la fin, un peu courte. Et, fatalement, j'en viens à attendre la suite...