L'étude des sources littéraires de l'Antiquité a depuis quelques décennies, pris en compte les topoi (lieu commun) de la littérature greco romaine. Autrement dit, dans ce livre on apprend, pour paraphraser un célèbre article que Dion Cassius n'est pas un collègue.
Héliogabale est né en actuel Syrie, vers 203 (selon wikipedia, l'ouvrage avançant la date de 205) ap JC. Ce que l'on sait de son ascension au trône impérial est très vague. Hérodien et Dion Cassius, avance (les historiens ne savent pas si Hérodien avait lu Dion Cassius) que Héliogabale aurait reçu l'appui d'une légion et aurait victorieusement triomphé d'un des autres prétendants au trône, se proclamant descendant des Sévères par la même occasion.
Le règne d'Héliogabale est notoirement infâme. Dion Cassius et Hérodien le couvre de tout les maux, vices, de leurs points de vues de romains. Il serait efféminé, cruel, et surtout, crime capital pour Dion Cassius, il aurait été une rupture dans la tradition romaine, notamment en instaurant le culte de Sol Invictus, ("le soleil invaincu"), qui remplacerait le culte de Jupiter.
Cependant, l'auteur montre, via l'étude des monnaies que le court règne (3 ans et 9 mois) d'Héliogabale est plus complexe qu'il n'y paraît. Héliogabale, si il met en place des réformes religieuses, cherche à s'inscrire dans une lignée, prodigue ses bienfaits (le fameux "le pain et les jeux"), bref, vise à donner l'image d'un bonne empereur.
Il finira assassiné dans des circonstances obscurs par la garde prétorienne, acteur de plus en plus important dans la vie politique romaine des derniers siècles avant la chute de l'Empire Romain d'Occident.
Cette image des sources antiques est comparé à la vaste bibliographie consacré à Héliogabale. Ce n'est que depuis très récemment qu'une image plus objective, dans la mesure du possible d'Héliogabale s'est formé dans les travaux historiques.
A la Renaissance, période de retour à l'Antique, Héliogabale, complètement oublié au Moyen Âge, devient la figure d'un mauvais empereur, son impopularité étant par exemple, noté par Machiavel.
A l'époque moderne, les historiens notamment Gibbon s'appuyant sur les sources littéraires existantes (donc Hérodien et Dion Cassius), ne le voit pas d'un très bon oeil.
Même les travaux de l'époque contemporaine (c'est à dire à partir de 1810 et le développement des universités en Occident), présente Héliogabale comme un "décadent". Ce qui devient intéressant, c'est que c'est cette image de décadence, qui inspira le mouvement décadentiste, qui fera d'Héliogabale une figure androgyne, hermaphrodite, presque positive. Citons notamment Jean Lombard, qui a consacré un roman décadent (bien qu'il est rejeté ce terme pour décrire son oeuvre) L'Agonie au règne d'Héliogabale.
Au XXème siècle la figure d'Héliogabale continue de fasciner. Elle fascinera Arthaud, et quelques auteurs homosexuels, qui feront de la figure d'Héliogabale parfois mis en scène dans le présent comme un homme gay, une image de l'activisme homosexuel confronté au carcan moral chrétien.
En somme, cette étude sur la Nachleben d'Héliogabale est fondamental. Malgré des développements peu intéressant sur le post modernisme (oui) vers la fin, un énorme travail de documentation, sans prendre en compte des frontières disciplinaires a été mis en oeuvre, pour donner une image plus juste du règne d'Héliogabale et de ses conséquences sur la culture européenne.