S’il est presque indéniable que l’auteur possède de bonnes qualités – notamment le ton cynique employé dans la plupart des textes, et l’art de trouver des expressions ironiques qui frappe (je pense à l’incoutournable : « Dieu a d’abord créé l’homme, et pour le remercier l’homme a ensuite inventé Dieu »). Mais, au-delà de ça, j’ai l’impression que l’auteur est obnubilé par l’idée de faire passer son message, non pas d’une manière normale, mais un petit peu trop obsessive – d’ailleurs, le « A qui me lira » posé avant le livre en lui-même le montre plutôt bien, même s’il a le mérite d’être d’une honnêteté sans faille.

Alors pour le coup, il y a ce message qui est passé, sur des faits actuels, sur des faits un peu étranges, mais il est tellement omniprésent, l’auteur est tellement certain de son projet, qu’il néglige le reste et qu’il se repose sur ses acquis. Pourtant, certains passages montrent clairement qu’il est capable de faire de chouettes trucs – je pense à la première nouvelle, où on joue sur la présence d’un objet important sans vraiment dévoiler l’homme qui le tient, et, si la chose est significative et chouette pendant les premières pages, elle devient vite lourde. La forme, en réalité, ne me semble pas exploitée, est délaissée au profit du fond et d’un message qui, finalement, pas si exceptionnel, bien mis en forme mais ne parviennant pas à subsister parce qu’il n’est plus soutenu par le style. A certains endroits, cela peut bien rendre ; à d’autres, notamment lors de la mauvaise exploitation de certains effets, clichés depuis longtemps – je pense par exemple à l’idée de repasser sa vie avant sa mort, avec une perception du temps qui ralentit, etc, et qui sert juste à repasser certaines situations – cela ne passe pas ; c’est soit ennuyeux, soit cela fait rire, à des moments où ce n’était clairement pas le but.

Cette mauvaise exploitation de la forme – qui me semble être un problème primordial, parce que, si le message peut être passé sous n’importe quelle forme, s’il est impossible de pressentir l’apport du format de la nouvelle, de la poésie – se voit surtout dans les poèmes ; inégaux comme les nouvelles, quelques vers me laissent à penser que l’auteur est capable d’écrire très bien, mais qu’encore une fois il se bride lui-même, en s’obstinant à faire passer son message avant tout : il en résulte une mauvaise maitrise de la forme, des poèmes qui ne le sont que par des rimes – maladroites – mais qui n’y ressemblent pas, pas de rythme, pas d’image : rien de poétique pour moi.

On notera tout de même que le recueil est sympathiques à lire, mais j’ai du mal à voir dans quel registre on peut inscrire la lecture : ni de divertissement (malgré les digressions interludiques parfois très chouettes), ni de littérature, ni de poésie (puisqu’à mon sens, il n’y en a pas, mais encore une fois c’est strictement personnel). Pour moi, cela manque clairement de maitrise et d’une maturité stylistique, et, bien que l’ensemble soit correct, on se trouve encore bien trop loin de ce qui est promis par le résumé et le titre, très accrocheurs.
Shalynia
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Lus en 2013

Créée

le 18 mai 2013

Critique lue 140 fois

3 j'aime

Shalynia

Écrit par

Critique lue 140 fois

3

D'autres avis sur Tragédies Salutaires

Tragédies Salutaires
mjose
10

Critique de Tragédies Salutaires par mjose

Un recueil de nouvelles assez surprenantes. Un style efficace (je n'aime ni les longues descriptions ni que l'on noie l'histoire dans un déluge d'informations qui ne nous avance à rien). Ici les...

le 3 juin 2013

1 j'aime

Tragédies Salutaires
MichelleCell
8

Critique de Tragédies Salutaires par MichelleCell

Bien, je vais moi aussi apporter ma pierre à ce nouvel édifice de la littérature française (belge en l'occurrence). J'ai découvert l'auteur il y a quelques temps sur un forum et je me suis donc...

le 3 juin 2013

1 j'aime

Tragédies Salutaires
1001ChroniquesEnFoli
4

Critique de Tragédies Salutaires par 1001ChroniquesEnFolie

Avant de commencer, je tiens à remercier Dario Bicchielli de m’avoir fait découvrir son recueil de nouvelles. Je n’ai pas l’habitude de lire ce genre d’histoire et malgré ma curiosité quant à...

le 1 juin 2013

1 j'aime

Du même critique

From the New World
Shalynia
10

Le monde se réduit soudain, au prisme parfait de ce visage aimé, le visage de Maria.

OMAGAD OMAGAD CETTE SERIE EST PUTAIN DE GENIALE, QUI SONT LES DEUX CONNARDS QUI LUI ONT MIS 4 ?? ... Ça, c'était grosso modo ma réaction les quelques minutes qui ont suivi la fin de mon visionnage...

le 28 sept. 2013

26 j'aime

12

Pandora Hearts
Shalynia
9

Critique de Pandora Hearts par Shalynia

Préambule Première chose : un AMV pour découvrir ce qu'est Pandora Hearts. J'ai - un peu - passé l'année à fangirler comme une adolescente de quinze ans (c'est assez laid, j'en aurais bientôt trois...

le 2 mai 2015

25 j'aime

7

Stupeur et Tremblements
Shalynia
3

Le verbe ''défenestrer'' est la seule chose chouette dans ce livre.

Bon, alors, ce livre il a une note de trois : 0,5 pour l'intention de vouloir faire une critique de la société japonaise (qui, au final, était plus que moitié foirée), 1,5 parce que j'ai quand même...

le 3 mai 2012

14 j'aime

2