Relatant son histoire depuis le moment où elle n’est encore qu’un embryon, nous découvrons Anna-Marie Caravelle, une jeune femme qui a vécu cachée durant son enfance, qui n’a donc pas eu l’occasion de se sociabiliser, d’apprendre les notions de bien et de mal comme n’importe qui. Ses émotions l’emportent, elle aime ou hait carrément, sans nuance, ce qui la conduit à réagir de façon extrême. Pourtant, malgré ce qu’elle est capable de faire, malgré son esprit torturé, sa folie, Anna-Marie est un personnage auquel on s’attache beaucoup. Rejetée dès sa conception (ou presque) par ses parents biologiques, elle va porter sa vie durant le fardeau de l’enfant rejeté et coupable. Luttant contre elle-même durant tout le roman, elle va parvenir pourtant à prendre une décision importante, réfléchie, responsable, mais dont les conséquences seront terribles.
L’écriture est prenante, addictive, même. Le récit se lit d’une traite, on se laisse emporter par les hauts et les bas de la vie d’Anna-Marie, avec, tout au long de l’histoire, la vision extérieure de cette jeune femme et de son sac au mystérieux contenu en fil conducteur. Beaucoup d’hypothèses se présentent au fur et à mesure de l’avancée dans la lecture. Et bien qu’il soit facile de deviner ce qui se trouve enfermé dans la toile, la révélation en est glaçante.
C’est un récit sombre, dur, violent, sanglant, dérangeant, qui prend aux tripes, plongeant le lecteur dans le marginalisme, l’alcool, la drogue, la prostitution, nous montrant le côté obscur de la Ville-Lumière et des Hommes. Pourtant, Anna-Marie s’accommode d’une telle vie, parvient même à être heureuse, pensant avoir enfin trouvé l’amour qu’elle attendait depuis si longtemps, cette sensation d’exister enfin aux yeux de quelqu’un. Pour un temps. Les anges aussi ont leur côté sombre. Et quand enfin la lumière jaillit au bout du tunnel, c’est pour se prendre le train en pleine face.
Solène Bakowski nous dresse un portrait sombre et à la fois magnifique par sa justesse. Anna-Marie Caravelle ne vous laissera pas indifférent. C’est impossible.