Le titre dit tout : ce roman nous plonge dans une cruauté absolue tout en conservant l'atmosphère d'un conte de fées ce qui justifie amplement qu'il ait remporté le Prix Robert-Cliche décerné chaque année au meilleur premier roman de l'année.
J'ai d'abord été attirée par ce livre en raison de son titre. Zorra est la traduction espagnole de renard et cet animal est mon animal fétiche. Cependant, il n'y a rien en rapport avec cet animal mignon dans cette histoire. Le roman raconte la vie et le destin de Zora Marjanna Lavenko, dont les parents meurent peu après sa naissance et qui est adoptée par Seppo, un tripier dégoûtant propriétaire de l'auberge de l'Ours qui pète. La première partie de l'histoire se déroule dans ce lieu macabre où se retrouvent les déchets de la société : avorteurs, violeurs, ivrognes. Au coeur de la terrifiante forêt des Fredouilles, au nord de la Finlande, l'auberge est emplie d'une ambiance terrifiante.
Le roman est marqué par sa qualité linguistique. En utilisant des termes qui nous situent dans l'époque et l'univers où se déroule l'action, un langage aux sonorités anciennes est utilisé pour décrire en détail des éléments cruels qui nous dégoûtent et nous terrifient. Il ne faut pas avoir l'âme sensible pour lire cet ouvrage. La nourriture est décrite avec une telle précision qu'on s'imagine la goûter - la cuisine de Seppo laisse à désirer, il utilise des tripes et toutes les parties animales sans aucun égard. Les actes cruels qui sont commis sont si biens décrits et dans un style d'écriture si bien choisi qu'on s'imagine en être les victimes.
Les avis sur le livre sont toutefois mitigées. L'une des principales critiques est que les contes de fées ont généralement une morale à la fin, et que celle-ci est absente du roman. En effet, la fin de l'histoire n'a peut-être pas de morale claire, mais je pense que l'ensemble des événements peut nous amener à nous interroger sur l'humanité. Les personnages sont des reclus de la société, agissant sans respect pour les autres, individualistes et cruels, traitant les autres (surtout les femmes) comme des animaux ou comme de simples poupées de chiffon, des bouts de viande.
La cruauté pratiquée, mais décrite comme une réalité, est choquante. Cracher sur un nouveau-né, violer une femme à plusieurs reprises et la garder comme esclave, kidnapper ou enchaîner des êtres humains, les nourrir à peine, les laisser uriner et déféquer les uns sur les autres... ce ne sont là que quelques exemples d'éléments décrits en détail comme faisant partie de la réalité. On peut facilement imaginer qu'à une époque de l'Histoire, de tels actes ont pu être perpétrés - et même aujourd'hui, dans des pays du tiers-monde. Même s'il ne s'agit que d'un conte ou d'une fiction, le fait d'imaginer ou de se demander si de telles pratiques ont pu se produire m'a fait éprouver un dégoût temporaire pour l'humanité au cours de la lecture du roman.
Heureusement, le personnage principal, Zora, est forte et, ne connaissant rien d'autre de la vie, elle ne semble pas se rendre compte de la douleur de son existence. Elle traverse diverses aventures et nous rappelle que dans l'adversité, plongé dans le mal, on peut toujours foncer et trouver un moyen de grandir.