Je n’ai pas aimé cette lecture mais elle m’a beaucoup intrigué. La personnalité de l’autrice éclate dans le style de l’écriture, notamment les descriptions qui sont extrêmement incarnées :
« Les vignes, telles des nattes de paille, se desséchaient à la chaleur de l'automne et pendaient aux épiniers brûlés qui entouraient les colonnades de la maison comme des dépouilles de sauterelles. Le soleil jaune trébuchait sur les pelouses et s'affalait sur les champs de coton coagulés. La campagne fertile, si riche en d'autres saisons, s'étalait, plate, des deux côtés de la route et gisait, prostrée, en éventails nervurés de découragement brisé. »
Des évocations aux contrastes violents, des images parfois excentriques jusqu’au surréalisme, faisant une part importante à l’impression que laisse paysages et atmosphères, plutôt qu’au réalisme… Ces descriptions parfois maladroites, mais toujours puissantes sont ce que je retiens de positif dans cette lecture. Qui sait ce que l’autrice Zelda Fitzgerald serait devenue, si elle n’avait pas tant essayée d’être autre chose, et s’était concentrée sur sa singularité, qui fait l’étoffe des grands stylistes… Je pense vraiment qu’elle avait un potentiel intéressant, probablement étouffé par l’ombre de son mari, ainsi que ses névroses (et psychoses).
Le roman est très inégal : j’ai donc d’abord été décontenancée par ce style à la fois si révélateur d’une personnalité spontanée et unique, et engoncé dans beaucoup de manières qui le rendait malhabile. Puis j’ai adoré ces descriptions du Sud américain, les relations familiales d’une famille cossue, où les jeunes filles sont des princesses hors de la réalité. J’ai aussi beaucoup aimé l’ironie constante d’un récit très autobiographique, où l’héroïne est spirituelle autant que tête-à-claques, illustration parfaite des jeunes mondaines snob des années 20.
Puis le moment où Alabama/Zelda se met à la danse m’a complètement désintéressé, et le rythme de la narration s’est trouvé changé et ennuyeux. Tous les accidents de style, que j’affectionnais au début, m’ont agacés, et j’ai fini par me dire que c’était un roman médiocre et sans envergure.
Le final relève le niveau, et je garde une image tendre (et pleine de compassion) pour Zelda Fitzgerald, qui pose sur sa personne et son milieu un regard acerbe et juste. Quelques essais de plus, et je suis sûre qu’elle aurait pu nous offrir un chef-d’oeuvre.