C’est peu dire qu’Amélie Nothomb écrit beaucoup. D’aucuns diront qu’à la sortie de chacun de ses livres (un chaque année) elle bénéficie d’une couverture médiatique disproportionnée par rapport à son œuvre. Une chose est sûre, Acide Sulfurique compte parmi les grands romans francophones des années 2000, parce qu’il a réussi à mêler réalité-show et…camp de concentration.
Avec un style concis, des phrases courtes, des métaphores simples, l’auteure belge arrive à nous plonger dans une drôle d’aventure où tout le monde est raflé « sans dérogation possible. Etre humain était le critère unique » pour construire de force un tunnel inutile devant des millions de téléspectateurs.
Nothomb nous dévoile tous les détails de cette entreprise scabreuse, avec les réactions du public, de la presse, et des « intellectuels », tout en se focalisant sur deux personnages. Zdena : la plus convaincante des bourreaux ou « kapos » et une « victime » qui jouera sans le savoir un rôle crucial : Pannonique ou le matricule CKZ 114.
Ainsi, à travers des scènes découpées comme au théâtre, Acide Sulfurique s’interroge sur le poids de l’image, la possibilité de se transformer en tant qu’individu, et pose la question suivante : jusqu’où est-on prêt à « se sacrifier » pour le groupe.
Le roman se lit facilement, certaines scènes ne manquent pas d’humour, et même si parfois Nothomb explique des passages déjà explicites, on apprécie son ironie féminine proche d’une Francoise Sagan, et sa manière d’aborder les problèmes d’hier et d’aujourd’hui.
Extrait qui illustre ce relativisme moral qui gagne du terrain de jour en jour : *« j’ai vingt ans, j’essaye d’accumuler les expériences, il ne faut pas avoir d’a priori sur Concentration. D’ailleurs, moi je trouve qu’il ne faut jamais juger car qui sommes-nous pour juger ? C’est quoi la normalité, c’est quoi le bien, le mal ? C’est culturel… »*