« Je suis debout, planté devant l’autel du placard grand ouvert, J’ai les yeux fermés. Je sens derrière moi le doux parfum d’une présence féminine ? Je descends lentement le sombre escalier du temps. »
À la rencontre des fantômes de l’escalier du temps, de ces grands absents à la présence familière, dans un conte délicat aux phrases musicales empreintes d’une douce mélancolie où se mêlent pour le plus grand plaisir du lecteur la vibrante violence des émotions des âmes dans le chaos des passions tristes. Un extraordinaire ouvrage, un cri de l’âme et l’esprit.
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« Un silence long et profond enveloppa le vieil homme venu de loin et la très vieille dame malade en une sorte de communion intense où l’un et l’autre étaient émus et bouleversés par le croisement inattendu de leur chemin de vie respectifs. »
Accompagné au bout de la nuit par Franz Schubert et Akira Mizubayashi, par l’harmonie de leur musique et leur littérature, vous ne manquerez pas de laisser couler quelques larmes d’émotion littéraire en goûtant le chapitre 7, pages 152 à 154, accompagné par l’Avé Maria de Schubert interprété par Pavarotti. Dans l’obscur XXIème siècle, en nos temps de dépossession individuelle, d’essentialisation du débat et de peur instillée chaque jour pour obtenir de force votre consentement, cet ouvrage est un cri à la liberté, à l’âme et l’esprit, un appel à la beauté, le vrai et le juste.
L’histoire est celle d’un violon blessé, d’un père disparu, de vies reconstruites perdues et retrouvées, de Rosamunde de Schubert et de la Gavotte en rondeau de la troisième Partita de Bach, des luthiers et des archetiers à Crémone et à Mirecourt, de la langue française ou japonaise, de Stradivarius à Nicolas François Vuillaume, des bruits de bottes à la guerre dévoreuse des âmes…Une histoire universelle et unique écrite en langue française par l’ancien sociétaire de la rue d’Ulm débarqué du Japon qui déclara : « Le jour où je me suis emparé de la langue française, j’ai en effet perdu le japonais pour toujours dans sa pureté originelle. Ma langue d’origine a perdu son statut de langue d’origine. J’ai appris à parler comme un étranger dans ma propre langue. Mon errance entre deux langues a commencé… » (In Une langue venue d’ailleurs, 2013)
De notre langue, Akira Mizubayashi note que nous utilisons les mêmes mots avec n’importe quel interlocuteur qu’il fut un garçon de café, un chauffeur de taxi, un médecin, un professeur ou un ministre. Le français est un bien commun que ses usagers partagent équitablement. Les relations sociales de supériorité et d’infériorité ne sont pas encastrés dans la langue comme dans le cas du japonais.