Racine, le classicisme resplendissant qui fait trembler les coeurs.
Oreste, fils d'Agamemnnon, est ici une figure maîtresse de cette tragédie. Elle s'ouvre sur lui et se referme sur sa plainte "Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes", furieux et fou d'amour pour celle qui l'a berné, Hermione, fille de Ménélas (cousine d'Oreste, donc). Mais que font ces deux fils deux ici, en Épire, dans le Palais de Pyrrhus, fils d'Achille ? Ils courent. Courent à la poursuite d'un destin qui se profile, la tragédie allant, devant eux.
Oreste,scène d'ouverture, arrive à la cour et annonce l'objet de cette venue : les Grecs réclament la tête d'Astyanax, l'enfant troyen, dangereux ennemi, qui ronronne dans le Palais de Pyrrhus. Il s'agit, comme dans nombre de tragédie racinienne, d'un amour impossible, fondement du canevas dramatique. En effet, le descendant d'Achille, du côté des Achéens, et épris d'Andromaque, la belle troyenne, femme d'Hector, le fils de Priam. Cette passion transgresse les dissensions politique entre la Grèce et la Troade, décide d'éluder la grande guerre, qui a causé la mort des maris et des fils des deux côtés. Il aime Andromaque envers et contre tout, il pourrait même répudier Hermione, à qui il a promis sa main, mais dont la main de cette dernière n'est pas si excitante que celle de la troyenne. Malheureux roi tyran, il va user de son pouvoir de mort sur Astyanax pour la faire céder à sa proposition, et cette dernière, prisonnière et soumise, devient souveraine du cœur de son bourreau et centre de la tragédie, pouvant influencer les amours des autres, car elle est au sommet de la chaîne des amours (aimée de Pyrrhus, aimé d'Hermione, aimée d'Oreste).
La beauté de cette emprise, de cette tension constante (et si Pyrrhus aimait finalement Hermione et renonçait à la veuve ? Mais c'est impossible ?) est parachevée par à une écriture fine et sensible. Racine transforme une passion destructrice et alimentée par la jalousie et l'amour propre, en un sentiment merveilleux, chanté par le vers racinien.
La beauté du verbe éclaire la puissance qui agit dans les cœurs des personnages, celle de l'amour, de la haine, de la mélancolie.