Anéantir
6.7
Anéantir

livre de Michel Houellebecq (2022)

Petit traité du XXIème siècle

Qu’attend-on d’un écrivain ? Qu’il nous élucide le monde ? Qu’il nous révèle ses aspects cachés ou impensés ? Qu’il partage avec nous sa vision du monde, soit optimiste, soit pessimiste ?

Dans ce cas Houellebecq remplit bien le rôle qu’on lui assigne.

Même si la forme est un peu trop classique ( l’auteur nous ayant fait connaître mieux par exemple dans La carte et le territoire) « Anéantir » est un roman-fleuve qui semble nous livrer le monde tel qu’il est, avec ses lourdeurs, ses surprises, ses vérités pas toujours faciles à affronter. Un roman de la vie en quelque sorte. Une vie ni plus palpitante ni moins attendue que celle que nous vivons tous les jours. Là est la force de ce roman qui colle au plus près du réel.

Un homme moyen, plus à l’aise dans les seconds rôles, sans grande ambition mais quand même intéressé par une certaine « réussite », dans une famille normale, avec ses petits secrets, ses petites rivalités, ses petits et grands drames, ses petites et grandes joies, au sein d’un couple moyen, surmontant des difficultés rencontrées par la majorité des couples et avec des questionnements banals sur le sens de l’existence, sur le rôle de l’amour, voilà le personnage principal du roman.

Cet homme traverse sa vie, rencontrant des médiocres ( beau personnage de journaliste woke malfaisante) ou des hommes d’exception ( très beau personnage de Bruno, ministre de l’économie et lettré), vivant des aventures parfois banales parfois rocambolesques ( Houellebecq se payant le luxe d’un mini-roman policier gigogne assez prenant au sein de son roman existentiel…) pour enfin se trouver confronté à sa propre finitude au sein du système médical décrit avec une grande précision. Le tout ponctué – on est quand même avec Houellebecq… - par la vie sexuelle très narcissiquement mâle du personnage fantasmant sur des mini-short et quelques petites méchancetés bien senties sur les hypocrisies sociales ou les dérives woke et extrémistes.

Peut-être pas un grand roman mais un roman très représentatif d’une fin de civilisation qui « déconstruit » tout ce qu’elle s’est efforcée à construire pendant des siècles et où la croyance religieuse apparaît comme une bizarre survivance vue avec nostalgie d’une époque où l’homme était plus que ce qu’il est devenu.

Une lecture que je conseille, sauf aux dépressifs, bien entendu.

jaklin
8
Écrit par

Créée

le 27 nov. 2023

Critique lue 454 fois

19 j'aime

11 commentaires

jaklin

Écrit par

Critique lue 454 fois

19
11

D'autres avis sur Anéantir

Anéantir
No_Hell
6

Un roman bankable qui s’avère plutôt bancal

Paul Raison est énarque et conseiller de Bruno Juge, ministre de l’économie et des finances. C’est dire qu’à quelques mois de la présidentielle de 2027, il a de quoi faire pour occuper ses jours et...

le 8 févr. 2022

29 j'aime

15

Anéantir
jaklin
8

Petit traité du XXIème siècle

Qu’attend-on d’un écrivain ? Qu’il nous élucide le monde ? Qu’il nous révèle ses aspects cachés ou impensés ? Qu’il partage avec nous sa vision du monde, soit optimiste, soit pessimiste ? Dans ce...

le 27 nov. 2023

19 j'aime

11

Anéantir
SombreLune
8

Il ne reste que l'amour !

Salut Michel J'espère que malgré la quantité de clopes que tu t'envoies quotidiennement tu vas bien. Evidemment je te souhaite une mort rapide voire violente qui ne te laisse pas le temps de...

le 28 janv. 2022

18 j'aime

9

Du même critique

L'Étranger
jaklin
8

L’ athéisme triste ou le triste athéisme

Après l’approche assez originale de Daoud, il est temps de revenir sur un devenu classique hors- norme : L’ Étranger de Camus. Tant il est me semble t’il aimé pour de mauvaises raisons : une langue...

le 22 août 2018

57 j'aime

95

Douze Hommes en colère
jaklin
9

La puissance du Bien

« 12 hommes en colère » est l’un des films que j’ai le plus vus, avec fascination, avec émotion. C’est un huis-clos étouffant donnant pourtant à l’espace réduit une grandeur étonnante – et le...

le 17 févr. 2019

54 j'aime

36

Ne dis rien
jaklin
7

La mort programmée des êtres policés

Je n’ai jamais regardé un film danois qui ne m’ait pas plu. Celui-là avait des airs de Harry, un ami qui vous veut du bien de Dominik Moll et je n’ai pas été déçue ! Pendant la plus grande partie du...

le 6 oct. 2022

52 j'aime

51