En réalité je n’aurais su employer meilleur titre que celui-ci. S’il n’est pas d’une grande originalité, puisque ce sont les mots même d’Oliver, cette phrase et l’une des plus emblématique de l’œuvre toute entière. Et elle résonne d’ailleurs magnifiquement bien dans la bande-annonce. Parce que oui, si j’en viens à écrire cette critique aujourd’hui, c’est grâce à elle, autrement je n’aurais sans doute pas entendu parler du livre dont le film est inspiré. Ce fut un hasard complet qui m’amena à la visionner mais en deux minutes seulement j’étais conquise par ce que je voyais et mon envie de voir le film était décuplée. Ce fut une claque que je n’avais pas vu venir, d’une beauté sans pareille, à la fois subtile conjugaison entre de beaux paysages Italiens, théâtre d’une passion entre deux protagonistes le temps d’un été, et d’une magnifique chanson de Sufjan Stevens sobrement intitulée Mystery of love. Bref de quoi ravir mes yeux et mes oreilles en même temps. Depuis mon premier visionnage je l’ai vu et revu tant ce trailer hypnotique rayonnait de beauté et de simplicité, de tension et de tendresse. Ça m’avait l’air si profondément intimiste que je trouvais ça inespéré. Mais le film en question ne sortant qu’en début d’année prochaine, il a bien fallu assouvir ma faim c’est pourquoi je me suis procurée un exemplaire du roman original d’André Aciman dont j’aimerais essayer d’en dire quelques mots.


Je ne sais pas si je suis la mieux placée pour parler de ce livre parce qu’en réalité je ne sais pas ce que je viens de lire et si j'arriverais à trouver les mots pour en parler le plus justement possible. Je me refuse d’ores et déjà à parler de "littérature gay" parce que je trouve ça horriblement stigmatisant et que ce serait dommage de réduire ce livre à une simple étiquette. L’auteur en émet d’ailleurs lui-même le souhait à travers son récit. Brouillons les frontières, faisons fi des cases dans lesquelles la société n’a de cesse de nous ranger, ce livre est bien plus que ça. J’ai aussi du mal à qualifier le livre de romance tant le terme sonne creux à mes oreilles et semble décrire superficiellement une histoire bien plus complexe que ce à quoi l’on voudrait la réduire. En revanche si je ne sais le qualifier je sais ce que je viens de lire : une lente agonie de 270 pages remarquablement écrite qui, loin de s’estomper, va crescendo à mesure que le récit avance.


Tout part d’une maison sur la côte Italienne et d’une coutume qu’on les parents d’Elio, 17 ans, d’accueillir chaque année un invité qui, en échange d’être logé et nourri a pour mission d’aider quotidiennement le patriarche dans ses tâches érudites. Ainsi chaque été c’est la même rengaine, un nouvel invité arrive puis repart quelques semaines plus tard et tout se déroule dans un climat d’extrême convivialité. Cependant cette année arrive l’élément perturbateur : un jeune professeur Américain qui, loin de l’agitation de la ville, compte profiter du calme de la campagne pour terminer son livre et pour qui Elio va littéralement brûler de désir. Vient alors la lente torture que j’évoquais plus haut. L’histoire étant racontée du point de vue d’Elio, on assiste à l’évolution de ses sentiments envers l’inconnu qu’on apprend à connaître avec lui. On s’interroge tout comme lui sur la signification du moindre geste, de la moindre parole, de la moindre attitude qui laisserait présager une évolution dans la relation qu’entretiennent les deux protagonistes. On tente avec lui de décrypter ce personnage énigmatique qui semble ne rien laisser transparaître, tellement nonchalant qu’il en devient presque agaçant. Elio est rempli de doutes, d’envie, d’interrogations, de fantasmes, de peur aussi et en cela il fait écho à chacun de nous. J’ai rarement vu un livre où tous les aspects de la passion étaient aussi bien décrits, jonglant de l’un à l’autre avec une aisance et une fidélité remarquable. Ainsi Elio et Oliver se rapprochent pour mieux s’ignorer, jouent entre intérêt et indifférence, et parlent sans oser se parler, usant de stratagèmes détournés pour arriver à se dire les choses sans utiliser les mots d’usage. Et surtout (résonance aussi au titre du livre/film/critique) ils se rendent compte qu’au final ils ne sont pas si différents au point même qu’ils sont tout à fait semblables. Alors on profite avec eux de leurs petites miettes de bonheur et même si on sait que tout va s’achever et que ce n’est que temporaire, il y aura au moins eu ces petites miettes teintées d’une profonde tendresse qui les marqueront pour une vie. J’ajouterais enfin que le cadre Italien se prête parfaitement bien à cette romance d’un été. Tout est si vivant, convivial, cultivé, insouciant… Notamment dans la troisième partie où l’action se passe à Rome j’eus vraiment l’impression de me retrouver dans La grande Bellezza avec ce côté tout autant immersif. L’Italie a vraiment un charme que je ne m’explique pas.


Je me suis surprise à lire le livre d’une traite tant c’était plus fort que moi, je voulais savoir ce qui allait se passer, comment les choses allaient évoluer (et pourtant je ne cours absolument pas après ce genre de livre). Finalement en 5h j’avais mine de rien dévoré plus de la moitié du bouquin. Puis arrivée à la fin de la troisième partie j’ai arrêté de lire pendant un moment. Pas parce que ce n’était pas au même niveau que le reste, mais parce que comme Elio et Oliver je ne voulais pas que tout s’achève. Je n’avais pas envie de faire mes adieux au livre, aux paysages d’Italie et à ses personnages si attachants. Mais ce n’était que repousser une échéance inévitable et qui fut d’ailleurs bien pénible parce qu’elle m’a énormément affectée sur le moment (j’voudrais pas faire ma fragile mais j’ai vraiment passé toute la dernière partie (qu'on pourrait presque qualifier d'épilogue) à pleurer à chaudes larmes).


En fait en y repensant, si, je sais comment qualifier ce livre. C’est une ode au souvenir rien de moins. Parce qu’au fond c’est ça le sujet du livre, malgré le chemin que nous fait prendre la vie, il est de ces personnes, à l’instar d’Oliver, qui signifient quelque chose et qu’on ne sera jamais prêts d’oublier. Parce qu’elles ont joué un rôle important dans notre vie au moment où on ne s’attendait à rien et qu’elles ont laissé une empreinte indélébile en nous et réciproquement. C’est touchant et horriblement bouleversant à la fois. A tel point que j’aimerais pouvoir me garder certains dialogues/monologues du livre tellement ils résonnent en moi et sont presque d’une vérité universelle.


Et maintenant que je peux comparer les deux, je peux presque vous assurer (me rassurer aussi) que le film va être aussi grandiose que le livre. Tout y est. TOUT.


https://www.youtube.com/watch?v=Z9AYPxH5NTM

Gabrielle_Goudet
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le 5 sept. 2017

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