La preuve archéologique de l'existence du serial killer n'en fait pas pour autant un grand roman...
Livre "culte" écrit en 1979 par un auteur depuis disparu, et exhumé en 2009 en français par les souvent avisées éditions Sonatine, cet énorme thriller de 900 pages, encensé par Stephen King et par James Ellroy, salué par des ventes impressionnantes, laisse tout de même sur sa faim...
La preuve archéologique de l'existence du serial killer dans le roman noir et le statut de précurseur sur ce thème ne peuvent effacer des réussites postérieures et nettement plus fortes telles "Dragon rouge" de Harris (1981) ou "Un tueur sur la route" d'Ellroy (1986), sans aller jusqu'à une synthèse plus récente comme "Le poète" de Michael Connelly (1996).
Quoiqu'en dise une certaine critique, ce n'est donc pas le personnage du tueur "incarnation du mal absolu" qui fait l'intérêt de ce roman, mais bien plutôt une figure de journaliste d'investigation, au sommet de son art, capable de mobiliser des ressources étonnantes pour parvenir à ses fins, avec une énergie et un quasi-machiavélisme rarement mis en scène, et une remarquable intrication d'intérêts politiques et médiatiques, plus ou moins corrompus, qu'Ellroy lui-même ne faisait qu'aborder dans sa quadrilogie de Los Angeles, et ne déployait pleinement qu'à partir d'"American Tabloid".
Le style, simple à la limite du simplisme, et l'intrigue, linéaire et sans surprise, fournissent sans doute une partie de l'explication d'un succès hors norme pour le genre : on n'y trouve pas les subtilités parfois déroutantes, pour le lecteur moins attentif, d'un Ellroy ou d'un Connelly, pour ne citer qu'eux. Pour la plage et le rapport poids/plaisir, on préférera nettement la trilogie Lloyd Hopkins ou le quatuor de Los Angeles, dont les reliures Rivages sont aussi nettement moins sensibles au sable que le collage Pocket...