Si avec "La zone du dehors" on découvrait un auteur maniant les mots et la langue francaise comme rarement, le bouquin avait des défauts propres à cette utilisation très litteraire justement, et le ton trop politisé.
Mais avec "La horde du contrevent", l'auteur trouvait l'equilibre PARFAIT entre fond et forme, une aventure extraordinaire servie par un style de très très haute volée, flirtant avec la très mince frontière du elitiste barbant qui se regarde ecrire, sans jamais la franchir. Un exercice ardu mais essai transformé.
Malheureusement avec ce recueil de nouvelle, l'ecueil n'a pas été evité, et cette limite est franchie à plusieurs reprises... Si l'imagination, les idées, la folie du bonhomme sont intactes, oniriques, poétiques, très belles et prenantes, la forme pêche par cet excès de zèle orthographique, grammatical, littéraire.
Il est certain que Damasio connait son sujet (notre belle langue nationale) et le maitrise comme personne dans le Fantastique (si ce n'est Jaworski), il tombe dans l'outrancier et le verbeux, dans l'alignement de phrases et le vocabulaire très recherché juste pour en mettre plein les mirettes, et du coup, d'admiratif on devient irrité par tant de redondances, de formules alambiquées, de césures incongrues.... Et au final ce sont les histoires qui en patissent.
Exemple le plus flagrant avec les nouvelles "Les Hauts parleurs", un bijou stylistique et un vocabulaire foisonnant, aux multiples jeux de mots hallucinants... mais tellement pris dans le maelstrom de son talent, il en oublie la clarté, et on ne comprend pas grand chose... Ou avec "Sam va mieux", complètement absconse.... Pareil pour "Aucun souvenir assez solide", courte et elliptique.
Heureusement il y a deux trois perles, le "So phare away", poétique et désespéré en diable, vision pessimiste d'un futur qui emprunte finalement beaucoup au présent... "Une stupéfiante salve d'escarbilles de houille ecarlate", magique et prenante, la plus rythmée du recueil, ou encore "C@ptch@", qui rappelle "La zone du dehors", et son eldorado illusoire au final...
Attention à l'auto satisfaction et à l'onanisme intellectuel cher Damasio, qui sont les pendants de vos qualités littéraires exceptionnelles... En espérant un prochain roman aussi inspiré que le déjà mythique "Horde du contrevent".