Récit initiatique à tiroirs placé sous le patronage du Nerval d’Aurélia, Aurora est un texte bourré à craquer de vision et de symboles, dans lequel de jeunes hommes sont guidés par une femme mystérieuse et idéalisée, Aurora, Or Aura ou Horrora selon les cas, dans différents plans du rêve. On descend des escaliers sans fin, avant d’aborder des pyramides célestes couleur de sang ou des buildings qui sont « des phallus obscènes qui grattent la vulve du ciel », le tout généreusement assaisonné de numérologie et d’alchimie.
Aurora est un texte de jeunesse de Michel Leiris, écrit dans les années 20 et publié vingt ans plus tard. C’est encore lui qui en parle le mieux, dans une note écrite en 1946 qui précède le texte : il y décrit un « fatras d’allure symbolique » et des « rodomontades dans le goût noir ou frénétique ».
Un fatras, il n’y a pas de meilleur mot, qui fait plus que flirter avec le cliché et qui est par ailleurs un condensé du regard objectifiant que porte l’érotisme surréaliste sur les femmes… Mais un fatras tout de même drôlement bien écrit, dont certaines scènes sont d’une fabuleuse force visuelle et sensuelle, et qui contient en son centre un fascinant récit enchâssé, la confession de Damoclès Siriel, récit à la première personne d’une vie en quête de sublime qui tourne à l’excès d’hybris et semble contenir en miniature tous les thèmes et les motifs de l’ensemble.