Alors que la guerre civile fait rage au Cambodge, Saravouth et Dara, onze et neuf ans, ont néanmoins pu, jusqu’en cette année 1971, mener une existence heureuse auprès de leurs parents, à Phnom Penh. Mais les combats finissent par atteindre leur ville. Séparé des siens dans la tourmente et réfugié dans la forêt, Saravouth va devoir survivre dans l’enfer d’un pays en plein chaos, avec pour seule obsession : retrouver sa famille.


Inspiré d’une histoire vraie, ce roman terrible et bouleversant commence doucement, au sein d’un cocon familial qui a jusqu’ici réussi à supporter les rigueurs de la réalité grâce au pouvoir des livres et de l’imagination. Saravouth s’est ainsi créé un monde imaginaire, alimenté par la littérature que lui fait découvrir sa mère. Le contraste entre cette poésie et la barbarie qui va venir la saccager n’en est que plus frappant, alors que, consterné, le lecteur voit bientôt sombrer les personnages, auxquels il a eu le temps de s’attacher, dans un maelstrom aussi terrifiant qu’inextricable.


Lorsque s’achève cette lecture aux allures de tornade, images et mots continuent à hanter longtemps l’esprit : pas seulement en raison des atrocités commises pendant cette guerre, mais tellement le destin de Saravouth s’avère stupéfiant de bout en bout, sa personnalité magnétique et sa force de survie impressionnante. En nous signalant le court métrage Odysseus’ Gambit, tourné sur Saravouth devenu adulte, l’épilogue nous permet de réaliser comment la vie de cet homme est demeurée bloquée dans une impasse tragique. L’on ne peut que s’émouvoir de la stupéfiante résilience de cet être fracassé depuis l’enfance, que la mort n’aura épargné que pour lui en laisser une terrible culpabilité.


Ce livre intense et vibrant se lit en un seul souffle de sidération et vous laisse groggy, accablé par le poids de certains destins que l’on dirait tragiques par essence, et impressionné, tant par son héros malgré lui, que par l’émouvant hommage qui lui est ainsi rendu. Coup de coeur.


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Cannetille
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le 2 déc. 2020

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