Albert Cohen a le don de créer une empathie pour ses personnages que je ne soupçonnais pourtant pas lorsque j’ai commencé ma lecture.
On commence le roman un peu moqueur vis-à-vis des personnages principaux que sont Ariane et son mari Adrien, tous deux en apparence si superficiels.
Le détail sera tel qu’on en saura plus que quiconque sur eux. La taille du roman le laissant présager, évidemment.
L’écriture est toutefois très singulière. Drôle, surprenante. Certaines fois difficile à suivre en raison d’une absence totale de ponctuation sur des pages entières. L’adaptation au registre de langue de chaque personne. Si juste. Il y aurait tellement a dire sur sa manière d’écrire.
Un vocabulaire très précis et imagé. Une compréhension inouïe de l’être humain dans ses moindres détails. Ses actes ridicules, ses préméditations et petites humiliations quotidiennes.
Mais rien de plus beau et touchant que les émotions et l’exactitude avec laquelle elles sont décrites. Combien de fois me suis-je reconnue, même dans les détails. Les relations humaines et leurs subtilités.
L’amour mais pas seulement ! Les relations familiales, si intimes et profondément ancrées en chacun de nous.
Une scène de fin dramatique et magnifique. Des souvenirs qui remontent chez Ariane et Solal, si tendres et forts que l’on est autant touché qu’eux. En effet, à la fin de cette lecture conséquente, nous avons tant partagé avec les personnages que nous les aimons presque.
L’importance des mots, de leur poids dans l’expression recherchée d’Ariane. Jusqu’au ridicule parfois. Le décalage risible entre les faits et la façon dont ils sont rapportés et décrits.
Bref, un livre de longue haleine, certes, mais un livre profond qui ne déçoit pas une seconde.