Personne n'est parfait.

A la fin des années 1970, Calista, une jeune femme ayant envie de découvertes, quitte son Angleterre natale pour faire un road-trip à travers les Etats-Unis où elle va rencontrer une camarade avec qui elle va faire le voyage, qui les mènera à Los Angeles. Cette dernière est invitée un soir à la table de personnes assez âgées , et on va découvrir que Calista et elle sont en train de diner avec entre autre, Billy Wilder, un des plus grands génies du cinéma. De fil en aiguille, Calista, qui a des origines grecques, va être invitée par le réalisateur à être son interprète sur le tournage de Fedora.

Bien que le livre soit entièrement fictionnel, les faits et dates qui y sont établis sont entièrement justes. D'ailleurs l'auteur, Jonathan Coe, a fait en sorte de croiser les sources, de rencontrer les quelques personnes encore en vie qui ont assistés de près ou de loin à la fabrication de Fedora, voire de mélanger parfois l'anecdote à la fiction, et ça donne, à mes yeux, un roman formidable.
C'est aussi facilité que pour moi, Billy Wilder est un réalisateur que j'adule, et que j'aime beaucoup Fedora, qui fut son avant-dernier film, mais dont on sent que la flamme n'est guère plus là.

L'histoire est du point de vue de cette jeune femme d'une vingtaine d'années, où tout est narré au passé par une Calista de 2020, à présent mère de jumelles, et qui se replonge à travers elles dans son propre passé, comment tout a vraiment commencé pour elle. Elle qui ne se prédestinait à rien, qui a de vagues connaissances musicales, dont le piano, et dont la rencontre avec Billy Wilder, puis l'amour, va en quelque sorte orienter sa vie. On retrouve dans l'écriture de Coe tout le côté pince-sans-rire de Wilder, son mépris pour les barbus (le Nouvel Hollywood), sa détestation des Dents de la mer, le traumatisme longtemps enfoui de son passé allemand en tant que danseur, son envie de raconter l'histoire des camps de concentration et enfin, sa bonhommie. En particulier lors d'un merveilleux passage dans une ferme de Seine-sur-Marne où il va découvrir le Brie et qui va être comme une parenthèse enchantée.
Pour en revenir au passé de WIlder, l'auteur va interrompre d'un coup le récit de Calista pour narrer un souvenir de jeunesse du réalisateur, situé en Allemagne dans les années 1930, et c'est écrit d'un coup comme un scénario, brillant du reste.

Cela dit, je me demande si le livre, qui se boit comme du petit lait, est autant accessible qu'il ne le fut à mes yeux si on ne connait ni Billy Wilder ni Fedora. Sans-doute que oui, car l'histoire est du point de vue de Calista, qui est inculte du côté du cinéma, ce qui fait la joie du réalisateur et son scénariste attitré, Iz Diamond. Ce qui ajoute au charme du livre, qui est un bonheur de lecture.

Quand on lit une phrase comme :

Tout me fait penser à un film, c'est plus fort que moi.

, j'aurais tellement aimé la dire, ou l'écrire...