Si vous cherchez de la nouveauté dans la pensée de François Bégaudeau, sachez que Boniments (2023) n'est ni plus ni moins qu'une (bonne) extension d'Histoire de ta bêtise (2019). Et comme tout bon contenu additionnel, il a été pensé pour ceux et celles qui ont trouvé satisfaction dans l'œuvre originale. Excepté les zélés qui traquent la moindre vidéo YouTube de l'auteur, les pourfendeurs du capitalisme auront de quoi se mettre sous la dent.
Après un Notre joie (2021) un peu fouillis (mais pas moins intéressant), le découpage de l'essai en courtes sections permet au lecteur de mieux digérer les informations transmises. Le format sériel du livre nous incite à ingurgiter les segments avec avidité, nous entraînant dans un véritable binge-reading. Paradoxal quand on sait que la "série TV" provoque un réflexe aversif chez l'auteur. Mais François Bégaudeau n'en est pas à son premier paradoxe ; pire, il les cultive. C'est précisément pour ça que nous avons la chance d'avoir un tel penseur dans notre camp. Même s'il veut nous faire croire que la nuance est au capitalisme ce que la mer est à Camus, François Bégaudeau, à son grand regret, produit une pensée nuancée ET radicale. Preuve en est dans sa précieuse analyse du terme Novlangue : traquer les boniments est aussi nécessaire qu'infécond. La compréhension du langage du capitalisme n'est pas consubstantielle à son anéantissement. Paradoxal. Nuancé.
Ceci étant dit, nous attendons avec impatience la version soap-opéra de Notre joie (2021), le tant attendu stand alone episode sur le langage du nationalisme autoritaire français.