Carmilla Court et surnage les romans du genre.
Carmilla est l'histoire d'une jeune femme, Laura, qui nous raconte sa rencontre avec une dénommée Carmilla, recueillie par son père durant quelques temps. Cette nouvelle relation, mystérieuse et fusionnelle, posera problème lorsque les deux tomberont malades l'une après l'autre. Ce mal inconnu et progressif qu'on appelle... le vampirisme.
Il est intéressant de savoir, avant même d'approcher l'oeuvre, que Bram Stoker s'est inspiré de Carmilla pour écrire son Dracula. On peut donc aisément parler d'un précurseur en la matière. Ce petit roman est d'autant plus intéressant qu'il aborde également une certaine forme d'homosexualité dans la relation des deux protagonistes principaux et une tension digne d'un très bon thriller qui maintient le lecteur à flot du début à la fin ; ce roman a cette particularité formidable en littérature, il est intemporel. Sheridan Le Fanu arrive à faire ressentir l'inquiétude des personnages et surtout la magnificence de Carmilla. Son charisme nous apparaît comme il apparaît à Laura, héroïne principale et la pression en devient jouissive car nous savons qui elle est. Nous devinons qui est Carmilla mais eux n'en savent rien. Nous sommes complices de cette horreur qui se joue sous leur nez. La grande force de l'auteur est de transcender ses personnages et son récit qui aborde par le séjour de cette vampire une légende entière en une centaine de pages. On retrouve toutes les passions que le vampire en tant que tel déchaîne avec authenticité parce que Sheridan Le Fanu ne tourne pas en dérision la race ou ne bute pas sur des détails par rapport à d'autres romans plus récents qui reposent sur des histoires faméliques. Le sujet a besoin de se reposer sur une forte psychologie et sur les ressentis plutôt que sur les actes. C'est ce que l'auteur arrive à transmettre à l'image de cette relation fascinante entre Laura et Carmilla.
Je regrette un peu cependant son style trop propre sur lui par instants et sa propension à accorder à Laura une importance trop relative. Si elle est crédule et donc une très bonne cliente pour cette histoire, ses apartés, inutiles à souhait, ne font que ralentir le rythme là où on aurait pu avoir une vraie réflexion et une émotion décuplée grâce à ses pensées. Malheureusement, son personnage est trop naïf et la fausse bonne idée de la première personne du singulier tombe à l'eau. Les rebondissements sont quant à eux prévisibles et (trop) attendus mais ce n'est pas ce que l'écrivain semblait vouloir mettre en avant, privilégiant le mythe et la vie décousue de l'héroïne vampirique.
Un bon roman qu'il faut avoir lu si on aime la littérature touchant aux vampires ou plus généralement au fantastique car il représente l'une des bases du genre.