J'aurais aimé mettre 9...
Cartographie des nuages est un roman qui parle de beaucoup de choses. En fait, c'est presque plusieurs romans.
On commence l'aventure vers 1850 en suivant le journal d'Adam Ewing, notaire américain de passage en Nouvelle-Zélande, sur fond de domination des colons blancs sur les Maori. On se retrouve ensuite plongé au début des années 1930 dans les lettres de Robert Frobisher, jeune anglais surdoué un tantinet prétentieux qui se met au service d'un vieux compositeur belge afin d'échapper à ses créanciers. Vient ensuite le tour de Luisa Rey, jeune journaliste qui va tenter de dévoiler un complot concernant la sécurité d'une centrale nucléaire en 1975. Puis Timothy Cavendish, éditeur des années 1990, enfermé contre son gré dans une maison de retraite. Finalement arrive le futur. D'abord avec l'histoire de Sonmi~451, clone-serveuse dans une société à la technologie avancée, puis la biographie orale de Zachry, simple berger dans un monde dévasté.
Le récit est construit de manière pyramidale, c'est-à-dire qu'on commence chaque histoire une à une, puis on les termine dans le sens inverse. Le livre se termine finalement par où il a commencé. C'est justement son leitmotiv : l'éternel recommencement ; que ce soit au niveau de chacun des personnages, qui luttent chacun a leur manière contre des individus à l'esprit carnassier à une époque différente, ou au niveau de l'humanité, qui malgré son évolution se retrouve victime de son propre égoïsme et reproduit les erreurs commises des siècles auparavant.
Au niveau littéraire, c'est tout simplement génial. Mitchell navigue entre les moyens (journal de bord, lettres, procès-verbal, ou biographie orale) et entre les styles (puritain, neutre, dialectal) et ajoute à cela de nombreux néologismes pour rendre ses personnages futuristes plus vivants. Chaque récit s'articule merveilleusement bien, dans la seconde partie tout du moins, comme du papier à musique.
J'en profite pour vous diriger vers la très belle critique de @lepsychopathe qui explique bien mieux que moi ce qu'on peu ressentir devant certains passages du livre : http://www.senscritique.com/livre/Cartographie_des_nuages/critique/14368788.
Ceux à qui tout cela suffit, foncez acheter le bouquin. Pour les autres, c'est difficile d'en dire plus sans spoiler un minimum. Je me contente ici de dire, que la quatrième de couverture m'a paru un peu mensongère et c'est pour ça que je n'ai pas mis 9.
ATTENTION SPOIL !
Pour ceux qui l'ont lu et pour les curieux, cette histoire de tâche de naissance en forme de comète est une vaste connerie. J'ai l'impression que Mitchell en a fait trop ou pas assez. Pour moi, le récit sans cette tâche est parfait. Malheureusement, on dirait qu'il y avait un cahier des charges avec la règle : "Les différents personnages doivent être liés" à la commande... Si on peut croire à un lien, entre éventuellement Luisa Rey et Robert Frobisher (et encore), ça reste difficile à appréhender pour les autres (je pense en particulier à Cavendish). En gros, c'est pas parce que je lis un bouquin de Philip K. Dick et qu'il avait un grain de beauté sur le majeur (je suis resté poli) comme moi que je suis sa réincarnation ou qu'on soit lié de quelque manière que ce soit.
Si la comète était une contrainte, il aurait du mettre les deux pieds dans le plat et y aller à fond.
