Après Pinocchio et Le Petit Chaperon Rouge, Joël Pommerat se confronte à un troisième conte. Décidant de s’opposer à la version de Perrault, l’auteur part de Grimm et s’interroge sur cette tendance qu’a la jeune fille à accepter toutes ses basses tâches ménagères.
Pommerat décide d’offrir alors un conte intéressant et intelligent sur le rapport au deuil et sur le sadomasochisme qui ressort du syndrome du survivant. L’auteur cherche à offrir plusieurs réflexions pleines de finesses, notamment en abandonnant la relation amoureuse pour la relation amicale entre deux orphelins. Il décide de mettre en avant la figure de la belle-mère comme le refus du temps qui passe. Enfin il joue avec les oppositions extérieur/intérieur, caché/révélé avec une certaine intelligence.
Pour autant la pièce a quelques défauts : sa dimension contemporaine semble mal assumée et servir plus à amuser qu’à traduire une réelle nécessité. Son entre-deux dans cette position se retrouve avec certaines figures, la Fée qui n’a rien de magique et incarne l’adolescence interroge : ses apparitions tendent à la répétition sans intérêt, sans faire grandir le propos. De même le rôle du père est trop effacé et secondaire. Le personnage finalement offre un contenu qui se limite à ses premières apparitions et rien n’est ajouté par la suite.
C’est une œuvre qui manque son projet. On sent de l’intelligence et un réel potentiel pour une grande œuvre mais malheureusement on a l’impression que l’ensemble propose un texte trop superficiel dans l’exploitation de ses idées.
Notons que cela peut venir notamment de la mise en scène qui a le souhait d’être aussi présente dans l’oeuvre que le texte. N’avoir que le second limite forcément l’expérience du lecteur.
En somme Cendrillon est une œuvre que l’on s’amuse à décortiquer pour voir l’intelligence de sa réflexion sur l’adolescence, le deuil, l’apparence et la représentation de soi, mais qui manque d’une profondeur à la hauteur de la quête que l’on entreprend à sa lecture.