Un artiste de la faiblesse
Dazai est un homme qui est né pour la contradiction et ultimement a croulé sous son poids....
Il ne sait parler que de lui-même. Les paysages ne l'intéressent pas beaucoup (même le Fuji il le décrit comme trivial, grossier), ils sont juste l'occasion d'une introspection mais pourtant il y a chez lui un abandon touchant dans sa façon de mettre à nu ses défauts comme autant de pièce à conviction. Il a voulu, encore et encore, donner en exemple sa vie.
Dazai est le plus chrétien des écrivains japonais. Il est né obnubilé par la force de sa subjectivité, l'abîme du péché en lui-même et son désir d'absolu. Il n'a pas pu échapper à l'inadéquation de sa grandeur d'âme et de sa faiblesse de caractère.
Il est un faible qui n'a jamais cherché à éviter le combat. Il sait qu'il est à lui-même son pire ennemi. Il n'a jamais cherché de faux-fuyant et ses occasionnelles vitupérations enragées contre ses frères, les femmes, ses contemporains et l'intransigeance de la destinée, ne l'ont jamais trompé. La vérité de son naufrage il la trouvera en lui-même, encore et encore et c'est là que son écriture trouvera sa gloire.
Mais si ce genre de combat avec l'ange est propice à la grande littérature, hélas, il l'est beaucoup moins quand il s'agit de réussir sa vie. Cette lutte qu'il a si bellement illustrée dans sa prose solaire, Dazai ne la résoudra dans les faits que par le suicide. Le plus chrétien des auteurs japonais devait connaitre une des morts les plus confucianistes qui soient... elle est venue couronner une vie placée sous le signe d'une inadéquation que seule la mort pouvait résoudre.