Mettez le désir et la frustration dans une grosse marmite. Faîtes mijoter à mots-doux. Brisez la pâte, et battez les phrases en neige. Séparez les paragraphes en histoires d'amour, ajoutez-y d'humour, une pincée de vie, et une bonne couche de douceur chocolatée. En ressortira toute l'amertume de l'héroïne Tita, et toute la saveur du style de Laura Esquivel.
A servir accompagné d'effluves rêveuses.
A chaque chapitre une nouvelle recette venue du Mexique. Cuisine de mots autant que d'aliments, c'est toute une tradition arbitraire qui se déguste au fil des pages. Tita est la dernière née d'une mère castratrice et violente. Ce qui fait d'elle la garde-malade à vie de sa génitrice. Elle ne pourra ni se marier, ni enfanter. On aurait envie de rôtir Mama Elena, pour laisser Tita et Pedro consommer sans danger cet amour interdit et passionné.
Rien n'est épargné à l'héroïne et pourtant l'intrigue, narrée avec autant de justesse que les épices, livre un fumet délicat, drôle et enjôleur. Le parfum des roses.
On se laisse emporter par cette gourmandise médicinale et magique. Magique ? Un peu. Car Tita est une superbe cuisinière. Avec elle, les sentiments se dévorent et nous imprègnent.
Pour une fois que se lécher les doigts pour faire glisser les feuilles laisse autre chose qu'un arrière goût de papier, pourquoi s'en priver ?
Nostalgiques, aphrodisiaques, meurtrières, les émotions de Tita vont tout droit dans les plats qu'elle prépares. Se communiquant des larmes à la fourchette.
Sorti en 1990, Chocolat Amer s'avère être un roman surprenant et attachant, bien ficelé, à ranger entre Le Parfum et Une gourmandise.
La même chose, s'il vous plaît !