Preuve est faite que malgré de bons ingrédients, une unité de lieu alléchante, un auteur dont la réputation n'est plus à faire, la mayonnaise peut obstinément refuser de prendre au fond du bol, alors qu'on avait l'eau à la bouche et déjà décortiqué les crevettes.
En fait de déguster une intrique classique, mâtinée de charme "vintage", on a davantage le sentiment de déchiffrer la rédaction d'un élève embourbé dans les exigences structurelles du genre. Un élève qui de sûrcroît aurait construit son intrigue à l'envers, à rebours d'un dénouement qu'il aurait imaginé - tout à fait erronément - génial. Sans doute la plupart des auteurs de romans policier procèdent ainsi, mais la plupart ont suffisamment d'habilité pour le dissimuler.
La seule et unique pulsion chez le lecteur de policier est de se faire berner. Il veut être emberlificoté, passé à l'essoreuse, largué au beau milieu de la forêt et dans les dernières pages se faire asséner un bon gros coup de massue sur la tête. Hors ici, assis sur la banquette avec Japrisot, on a le sentiment désagréable d'avoir tout du long le nez fourré dans le capot et, à l'arrivée, que la destination ne justifiait pas le prix du ticket.
Les personnages aux contours déjà pesants, disgracieux, exagérément exaltés ou dépressifs sont aussi desservis par le recours excessif au discours indirect dont le double effet KissKool est de rendre le style poussif et le sens parfois opaque.
Bref, je ne saurais que trop vous conseiller de faire plutôt un tour du côté de Boileau-Narcejac, de véritables maîtres du genre, eux.
Merci de m'avoir lue,
Dustinette