Genève au XVIe siècle. Jean Calvin, opprimé par l’Inquisition catholique pour ses convictions religieuses, trouve refuge en Suisse. Genève est une ville gaie, heureuse, tolérante dans laquelle de nombreux hommes taxés d’hérésie ont trouvé refuge.
Peu à peu, Calvin prend possession de la ville. Il y prêche la nouvelle doctrine réformée, prône l’austérité, exhorte à la discipline la plus stricte. On l’écoute. Le visage de Genève change, se ternit sous les assauts de celui qui se mue en dictateur de conscience. Car Calvin compte imposer ses idées. Et pas seulement par le prêche, mais aussi par la contrainte physique. Les récalcitrants sont rappelés à l’ordre, puis mis à l’amende, emprisonnés ou même exécutés. Calvin fait ainsi régner la terreur sur la ville et sur une large part du territoire suisse.
Bien peu osent contester son autorité. Bien peu se lèvent pour protester. Mais parmi eux, il se trouve un homme d’une probité et d’un ascétisme absolu : Sébastien Castellion. Par la plume, il répond posément à la violence. Il relève les contractions de l’opprimé devenu à son tour oppresseur. Il révèle l’iniquité de ses actes contre tous les hommes coupables de penser différemment, l’intolérance de l’homme qui, ayant fui les atrocités de l’Inquisition catholique, invente en quelques années l’Inquisition protestante.
Castellion met en péril sa propre vie. Il est d’abord contraint de quitter Genève et se réfugie à Bâle, ville tolérante et multiculturelle par excellence. Les deux hommes jouteront à distance des années durant.
Stefan Zweig ne se contente pas de nous conter les guerres de religion qui ont ensanglanté l’Europe à l’époque de Catherine de Médicis. Il en profite pour vanter la tolérance et stigmatiser la dictature et la répression. Toute idée ou doctrine, si juste soit-elle, nous dit-il, ne peut être imposée de force. Elle doit être expliquée et s’étendre dans la tolérance et le respect de chacun. Ce texte, écrit en 1936, fait évidemment référence à la montée du nazisme en Allemagne et à l’oppression d’un dirigeant fou à lier voulant faire de ses idées personnelles une doctrine universelle.
Un livre extraordinairement moderne à l’heure où l’intégrisme islamiste est entré en guerre contre le reste du monde. Un livre à mettre d’urgence entre toutes les mains.