En févier 1927, alors que le tout Paris assiste aux obsèques de Marcel Péricourt, son petit fils Paul fait une chute d'un balcon qui va le laisser paralysé. Madeleine, la fille de Marcel Péricourt, doit prendre la tête de l'empire créé par son père et compte pour cela sur les conseils de son entourage.
Couleurs de l'incendie (publié en 2018) est le second roman de la trilogie de Pierre Lemaitre commencée avec Au revoir la haut (Prix Goncourt 2013).
Le succès du roman et de son adaptation cinématographique ont nourri une certaine impatience quant à la sortie de ce deuxième roman qui décrit, à partir de 1927, l'histoire de Madeleine, bien obligée de s'intéresser malgré elle aux affaires de son père. Novice sur le plan professionnel, jusqu'à présent épouse du Capitaine Pradel détenu en prison et mère de famille, Madeleine va compter sur son oncle Charles Péricourt et le banquier Joubert pour la seconder.
Victime d'une escroquerie, elle va tout mettre en oeuvre pour exercer sa terrible vengeance.
Elle sera aidée en cela par Dupré, un ouvrier anarcho-communiste partisan du chaos qui se révèlera particulièrement efficace.
Alors que le drame se noue, la France des années 30 regarde l'Europe s'enfoncer dans les marécages du nationalisme et rougeoyer les premières lueurs de l'incendie qui va dévaster le monde.
Avec un sens de la narration remarquable, Pierre Lemaitre nous conte une saga digne de Monte Cristo. Avec comme thème central la vengeance, l'auteur parvient à créer des relations complexes entre les principaux protagonistes du roman. C'est ainsi que "l'union sacrée" de Marcel Péricourt et du banquier Joubert plongeront Madeleine dans une situation précaire. Madeleine qui croyait pouvoir compter sur Léonce, sa ravissante dame de compagnie, en toute circonstance, va vite déchanter. André, le précepteur de Paul, qui semblait être au dessus de tout soupçon va également bien désagréablement la surprendre.
Dans l'étude détaillée de ses personnages, Pierre Lemaitre fait preuve d'un grand sens du détail et de beaucoup de minutie. Il réserve au lecteur quelques rebondissements majeurs. Plutôt objectif dans ses études de personnages, l'écrivain prête toujours une part d'ombre à ses protagonistes, même lorsqu'il s'agit de "gentils". La seule exception demeure le personnage de Paul, un enfant qui va se retrouver handicapé, victime d'actes odieux mais dont il émane pourtant presque toujours une certaine lumière et un don certain pour la résilience. Le petit garçon retrouvera sa joie de vivre perdue grâce à l'opéra, se liant même d'amitié avec une célèbre cantatrice.
Au passage, Pierre Lemaitre revient sur le contexte des années 30 avec la montée de l'antisémisme et des nationalismes, la lutte contre la fraude fiscale alors que les caisses de l'Etat sont vides (..).
Au final, on peut se dire que certains thèmes de ce roman sont toujours d'actualité et que ce n'est certainement pas un hasard.
Couleurs de l'incendie est un roman réussi dans lequel le drame qui oppose les protagonistes rejoint l'Histoire avec un grand H.
En quelques heures, une famille riche et respectée venait de connaître la mort de son patriarche et la chute prématurée de son unique descendant mâle. Des esprits défaitistes auraient pu y voir l’expression d’une prophétie.
Ma note: 8/10