De grandes espérances par Diothyme
Dans l'Angleterre du XIXe, un jeune orphelin est elevé par sa soeur, de vingt ans son aînée, acariâtre et violente, et par son mari, un forgeron généreux et honnête mais dont l'esprit ne brille pas par sa vivacité. L'enfant porte le nom de son père, "Philip Pirrip", mais étant incapable de le prononcer, il utilise la contraction "Pip", à laquelle tout le monde s'habitue rapidement. Un jour qu'il part dans les marais, visiter la tombe de ses parents et ses cinq frères et soeurs inconnus, il tombe sur un étrange homme en guenilles, un fer aux pieds, qui le somme de lui trouver de la nourriture et une lime sous peine que le jeune homme qu'il cache avec lui, lui dévore les entrailles. Pip, effrayé, vole des victuailles, profitant qu'elles soient en abondance du fait du repas de fêtes. La peur au ventre, il ne dort plus, craignant d'être découvert, mais son forfait aussitôt révélé, des soldats sonnent à la porte et emmenent Pip, Joe son père adoptif, et un convive à la chasse au forçat, dans les marais. Le prisonnier en fuite est rapidement appréhendé, en train d'attenter à la vie d'un de ses compagnons, tous deux sont rammenés en prison. Peu après, l'oncle de Joe emmène Pip chez une vieille dame excentrique : Miss Havisham, dont toute la maison est figée dans le passé. Elle, le fait jouer aux cartes avec une fillette de son âge, qui aime à l'humilier. Il en tombe éperduement amoureux. Depuis ce jour, il décidera de tout faire pour ne plus être le garçon grossier qui a fait rire la demoiselle, et devenir un véritable gentleman afin de concquérir son coeur. Quelques temps plus tard, un bienfaiteur inconnu prend Pip sous son aile, et lui alloue des fortes sommes d'argent pour son éducation. Les seules conditions sont : de garder le nom de "Pip" , de ne pas faire de recherches sur l'origine de sa fortune, et de toujours garder ses grandes espérances. Celles-ci vont-elles se réaliser? Le chemin du jeune homme est loin d'être tout tracé.
Dans mes lectures d'auteurs classiques, il me manquait encore Dickens, oui, j'ai honte! J'ai choisi ce roman-ci, car les contes de Noël (le fantôme des noëls passés présents et futurs...) nous sont servis à toutes les sauces et qu'on commence à connaître l'histoire par coeur et que le Mystère d'Edwin Drood est inachevé, il a vu l'auteur mourir avant de finir d'en écrire la fin. L'histoire d'apprentissage de la vie de "Pip" (je ne me ferai jamais à ce nom...), se situe entre le conte pour enfants traditionel avec certains mécanismes surannés, et une histoire un peu noire à la Poe. Le côté enfantin, n'est d'ailleurs pas pour me déplaire, ce sont des lectures qui ont leur intérêt, quand elles ne sont pas édulcorées et vidées de leur substance. Le style, comme on peut s'y attendre d'un auteur anglais du XIXe siècle, nous fait goûter au subjonctif imparfait sur lit d'expressions tombées dans l'oubli, quel bonheur! En ce qui concerne les personnages, il sont plutôt caricaturaux, et l'intrigue connait quelques longueurs, toutefois, elle est sauvée par de nombreux rebondissements, dignes d'un scénario des Desperate Houswives. J'ai beaucoup aimé la façon dont l'auteur a traité l'introspection de Pip dans la première partie du roman, les craintes qui l'assaillent, et sa logique incongrue, il évite de tomber dans le piège de l'enfant mièvre et sans relief. Il y a quelques scènes absurdes très drôle, comme la famille Pocket, où la "maison" de Wemmick, véritable rêve psychogéographique. On y trouve aussi une once de fantastique, notamment lors de la rencontre avec Miss Havisham, le lecteur rationaliste n'y verra là que le phantasme d'une imagination puérile et impressionable, mais il ne nous est pas interdit de prendre la scène au premier degré. Les grandes espérances est une oeuvre à mettre entre toutes les mains, dans laquelle, je me permets de penser que l'auteur a voulu donner une certaine portée educative.