L'action débute au printemps 1826, dans la ville de Saint Louis (Missouri), où le narrateur, William Wyeth, vient chercher fortune et l'aventure. Il devient trappeur et finit par s'engager auprès d'Henry Layton qui monte une expédition pour la Compagnie des fourrures de Market street qu'il a lui-même fondée. Layton et Wyeth sont accompagnés de quelques autres hommes pour former une équipe à l'affut des castors qu'ils apprennent à piéger.
De retour d’une première expédition, le narrateur rencontre une femme qui lui plait : Alene. Mariée à Bailey, elle est veuve depuis la mort de celui-ci dans un accident de chasse. Wyeth approche Alene qui se méfie un peu. Néanmoins attirée, Alene s’oppose comme elle peut au besoin d’aventure et de liberté animant Wyeth. Elle, aimerait bien sortir des grands espaces pour une vie bourgeoise en ville, à Saint Louis. Alors, Alene laisse partir Wyeth pour une nouvelle expédition en lui faisant promettre qu'il la retrouvera avant la fin de l'hiver. A vrai dire, ce genre de promesse dépend de tellement d'imprévus qu'Alene n'y croit pas vraiment.
Le roman s'étire sur plusieurs saisons et années de trappe. Il met en scène des américains, des anglais et des français qui convoitent des territoires qui, à la base, appartiennent aux peuples Indiens. Très bien documenté historiquement, le roman tire sa crédibilité de ce côté, intégrant naturellement à l’intrigue de nombreux détails techniques et politiques. La narration tient compte de ce jeu de recherche du pouvoir entre les différentes nations représentées sur le terrain, sans oublier les rivalités entre les différents clans indiens ainsi que les amitiés et inimitiés dans le sein même du petit groupe de trappeurs.
A ce titre, le meilleur portrait dressé ici est celui d’Henry Layton dont les sautes d'humeur, à peu près imprévisibles parce qu'illogiques, donnent beaucoup à retordre à ses adversaires ainsi qu’à ses compagnons. Très imbu de sa personne et n'hésitant pas à provoquer les uns et les autres, il se révèle aussi très bon sur le terrain comme combattant. Sur le point de devoir affronter une véritable rébellion, en deux coups de cuiller à pot, il gagne l'estime et le respect de son équipe. Pourtant, au sein de cette équipe personne ne peut oublier ses défauts. Le personnage finira comme sauveur incontestable de ses troupes, dans des circonstances dramatiques. Le roman y gagne en puissance, car le portrait du narrateur manque un peu d’originalité. Ses aventures valent pour son histoire d'amour agréable, ainsi que pour son amitié avec Ferris, son compagnon de galère. N'oublions pas quand même toutes les péripéties proposées par ce roman plutôt bien mené. Mention spéciale pour la course improvisée en pleine nature, avec un magnifique cheval comme enjeu. Mais… d’où vient ce cheval ?
Signé Shannon Burke, ce roman (son troisième à être traduit en français) se révèle une agréable lecture. Agrémentées de nombreuses péripéties, les 278 pages se parcourent aisément. L'auteur soigne l’aspect historique et sa trame intelligente, mais au détriment de son style pas vraiment marquant. A la décharge de Shannon Burke, ma lecture de Butcher’s crossing il y a environ un an est peut-être encore trop proche, sur des sujets présentant de vraies similitudes : chasse aux bisons pour Butcher’s crossing et piégeage des castors pour Dernière saison dans les Rocheuses. Ce dernier mérite la découverte, mais reste à mon avis inférieur au roman de John Williams.