Dino Egger, ce grand homme, n'a pourtant jamais existé. Pourquoi ? Comment ? Quelle aurait pu être sa vie ? C'est le sujet de ce livre, portrait en creux d'un illustre personnage tout en potentialités avortées. On enquête sur son entourage, sur les raisons de sa non existence (un avortement ? un faiblesse génétique d'un des géniteurs ?), sur ses potentiels parents, sur ses inventions, conquêtes, oeuvres géniales ou découvertes scientifiques qui n'ont jamais vue le jour et dont nous devons malheureusement nous passer, comme : "100. Le soulier en cirage, toujours impeccable" ou "122. La poursuite des travaux de Darwin avec moins de complaisance et plus de pénétration, aboutissant à la conclusion que la tarentule descend de l'homme, qu'elle est sa main devenue si habile tueuse qu'elle n'a plus besoin du bras."
La nature absente de Dino Egger rend la tache bien compliquée à son biographe, Albert Moindre, qui dans ses périodes de découragement nous parle de sa propre vie. Rejeton d'une dynastie d'éclusiers, il veut s'échapper de l'avenir monotone qui lui est promis. Mais ses capacités d'intégration sociale sont plus que limitées et il a bien du mal à trouver sa voie.
Un exercice de style comme Eric Chevillard en a l'habitude, avec un humour proche de l'absurde. Certains se lasseront de ne pouvoir s'accrocher à une réelle intrigue : il ne semble pas y avoir de progression dans les livres de Chevillard, les pages peuvent presque être lues dans un ordre aléatoire. Le thème est décliné avec intelligence et superbement écrit, mais n'y a pas d'histoire profonde, de rebondissement ou de théorie extraordinaire.