Faut-il se fier complètement à la couverture d'un livre ou au contraire ne pas se laisser influencer par elle pour ne pas être déçu dans ses attentes ? Car c'est bien ce critère (ainsi que le titre que j'ai trouvé magnifique et prometteur) qui a déterminé cette lecture dans un premier temps. L'éditeur ainsi qu'un premier avis très enthousiaste a fait le reste.
C'est pour cela que cette découverte est un peu en demi-teinte. Une histoire de thé, de fantômes et d'histoires à raconter, c'était la promesse d'un voyage dans un récit sentant bon l’ère victorienne, le fantastique obscur mâtiné d'un soupçon d'Earl grey à partager au coin du feu d'un manoir hanté. Le contraire absolu de ce livre que l'éditeur classe dans cette catégorie de réalisme magique (plutôt dans le sens premier du terme, utilisé par le critique allemand Franz Roh en 1925). Car c'est bien à partir d'un territoire existant dont on sent que l'autrice connait les moindres recoins, que l'histoire se déploie petit à petit. Nice. Non pas le Nice touristique mais le vieux Nice, et même l'arrière-pays, tous ces villages peu connus même par les citadins eux-mêmes.
Une histoire de famille, de secrets magiques, de naissances compliquées et de gémellités non désirées (sans trop en dire). Une histoire perdue qui doit être retrouvée, reconstituée à partir de fragments épars à travers différentes bouches (du narrateur aux différents protagonistes du livre) dont peut-être la nôtre (rien qu'en en faisant la critique) dans différents lieux parfois hors de France, telle une théière cassée dont la réparation minutieuse prendrait des mois (à l'aide de poudre d'or dans les cassures, des défauts qui deviendraient des splendeurs).
Mais ce conte familial qui certes parfois cruel a été moins savoureux que ce thé, ce breuvage si parfumé, si épicé qu'il a besoin d'un apprentissage de chaque instant sous le patronage de Marine (personnage hors de la famille, le plus intéressant de l'ouvrage), qu'il convoque tous les sens et provoque des effets aussi bien sur les vivants que sur les morts selon la composition. Faire du thé, choisir sa théière et chauffer l'eau devient un art subtile dont les descriptions littéraires font parties des meilleurs moments du livre. Comment bien choisir sa première théière ? Quel note de musique doit être atteinte pour avoir la température idéale de l'eau ? Tous ces questions sont fascinantes et auraient mérité encore plus de développement. Cette soif n'a pas été apaisée.